DU BREVET AU BAC

jeanterminaletechno · Inscrit le: 09 Aoû 2014 Messages: 30

DISSERTATION
Avons-nous le devoir de chercher la vérité ?

INTRODUCTION

Dans une époque marquée par la rationalité technoscientifique, la vérité est presque vue comme une valeur. Elle relèverait donc du domaine de la morale et on pourrait parler d'un devoir de recherche de la vérité. Toutefois, cette idée n'est réellement évidente. A première vue, le domaine du Vrai est distinct de celui du Bien, qui est la morale, et il parait paradoxal de les associer.

La recherche de la vérité ne relève-t-elle pas plus d'un désir qu'un devoir ? D'ailleurs, ne peut-on pas vivre sans la vérité ? Mais, si l'on considère la vérité comme un idéal ayant une valeur en soi, la recherche du vrai est-elle alors morale ? N'est-elle pas plutôt une erreur, étant donné que la recherche de la vérité peut mener à des dérives et des déceptions ?

A première vue, la recherche de la vérité est plutôt un désir qu'un devoir : d'ailleurs, on peut même choisir de vivre sans la vérité. Toutefois, nous verrons ensuite pourquoi on peut aussi affirmer que l'homme a le devoir moral de rechercher la vérité, qui a une valeur en elle-même. Mais, pour certains, il faudrait au contraire éviter de rechercher la vérité : il ne s'agit pas d'un devoir mais d'une erreur.

I A première vue, la recherche de la vérité est plutôt un désir qu'un devoir : on peut même choisir de vivre sans la vérité

A Les hommes se complaisent dans l'illusion
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Généralement, les hommes ne considèrent pas la recherche de la vérité comme un devoir. L'ignorance peut même être vue comme une vertu : « Heureux les ignorants » dit-on parfois. Elle est en effet associée à l'innocence et l'optimisme, notamment en ce qui concerne les enfants.

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Platon explique ainsi que les hommes se satisfont de la doxa (l'opinion) qui est l'apparence du savoir. Ils se contentent de l'illusion et restent donc dans l'erreur au lieu de rechercher la vérité. Platon, dans La République, compare les hommes à des prisonniers qui auraient été enchaînés dès leur naissance dans une caverne. Ils se connaissent pas le monde réel : ils ne voient que les ombres des objets extérieurs et les prennent pour des objets réels.

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L'illusion serait un moyen d'amoindrir notre crainte du néant de l'existence. C'est ce que certains reprochent à la foi, qui ne serait qu'une illusion inventée pour consoler les hommes par la croyance dans une transcendance ou dans une vie après la mort.

B La croyance peut remplacer la vérité
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D'autre part, si les hommes ne recherchent pas la vérité et ne la ressentent ni comme une obligation ni comme un devoir, c'est en raison des croyances. Les croyances pourraient en fait remplacer la vérité.

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Par exemple, pendant longtemps, les hommes trouvent les explications des phénomènes naturels dans une divinité : on s'appuie par exemple sur les mythes dans l'Antiquité grecque ou sur la Bible dans la religion chrétienne. C'est l'État théologique évoqué par Auguste Comte dans sa loi des trois États. Ensuite, pendant l'État métaphysique, les explications du monde sont trouvées dans une prétendue volonté de la nature. C'est seulement après avoir vaincu ces croyances que la recherche rationnelle de la vérité a pu s'imposer dans l'État positif.

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Il semble donc que les croyances, souvent, se substituent à la vérité : la recherche de la vérité ne semble alors pas être un devoir. On peut vivre et même avoir l'impression de comprendre le monde sans la vérité.

C La recherche de la vérité est un désir
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La recherche de la vérité semble être un désir de l'homme, une aspiration universelle. Même si cette vérité a changé de nature (elle a été religieuse puis métaphysique et enfin scientifique), notamment au fil des progrès techniques et scientifiques, l'homme a toujours essayé de trouver des explications pour le monde qui l'entoure. Kant a remarqué en effet qu'il est de la nature de l'homme de se poser inlassablement des questions, de rechercher sans cesse la connaissance, afin d'atteindre la vérité.

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On peut trouver des explications à cette aspiration, qui tiennent aux valeurs utilitaires de la vérité. La vérité permet le progrès de la science et donc de l'humanité, par exemple dans la médecine. En effet, Descartes explique que la science rend les hommes « comme maîtres et possesseurs de nature ». La recherche de la vérité serait donc un désir, car elle permet de dominer la nature et d'acquérir du pouvoir.

II Toutefois, certains affirment que l'homme a le devoir moral de rechercher la vérité, qui a une valeur pour elle-même

A Le Vrai a une valeur en soi
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La vérité aurait non seulement une valeur utilitaire, qui en fait un objet de désir de l'homme, mais aussi une valeur en soi. Le Vrai serait donc un idéal, comme le Bien ou le Beau. En conséquence, il ne faut pas se contenter des vérités utiles mais rechercher la vérité en général : il s'agit d'un devoir moral. C'est cet élément que souligne Aristote en disant des premiers philosophes qu'« ils poursuivaient le savoir en vue de leur seule connaissance et non pour une fin utilitaire » (Métaphysiques).

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Platon explique ainsi que les hommes doivent s'arracher au monde de la doxa pour atteindre le monde des Idées, où se trouvent les vérités. Dans l'allégorie de la caverne, le sort des hommes qui restent dans l'illusion est un des problèmes les plus graves des hommes.

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Ce serait ainsi la philosophie qui permettrait d'accomplir le devoir de vérité. Platon évoque un homme qui se libère de ses chaînes, quitte la caverne et découvre donc les idées. Cet homme est le philosophe, qui peut accéder à la vérité et doit ensuite la transmettre aux autres hommes. La recherche de la vérité serait donc un devoir, qui peut être accompli grâce à la philosophie.

B Il faut chercher la vérité pour se rendre digne de l'humanité
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D'autre part, si l'homme a le devoir moral de rechercher la vérité, c'est parce que la conscience et la raison sont des facultés proprement humaines : seul l'homme a le pouvoir de raisonner pour connaître la vérité. En conséquence, y renoncer reviendrait en quelque sorte à nier son humanité.

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En particulier, les rationalistes insistent sur l'idée que la conscience et la raison sont les premières caractéristiques de l'homme. Descartes, l'un des philosophes rationalistes les plus célèbres, défend en effet l'idée que « le bon sens » qui est « la puissance de bien juger, et distinguer le vrai d'avec le faux » est une faculté naturelle et universelle parmi les hommes. La constatation « je pense » est en effet pour Descartes la seule certitude absolument indubitable, qui est prouvée par le Cogito.

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Puisque l'homme est un « animal pensant », il se doit de réaliser son humanité en utilisant la toute-puissance de sa raison pour sortir de l'ignorance. Ce serait en fait une question de dignité.

C Il faut chercher la vérité sur soi-même
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D'autre part, on affirme de plus en plus que l'homme a le devoir de chercher la vérité sur soi-même. Il doit acquérir, par un processus volontaire, une meilleure connaissance et conscience de soi.

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Freud explique ainsi que l'homme ne détient pas naturellement la vérité sur soi-même. Pour lui, le sujet n'a pas une conscience toute-puissante et immédiate à elle-même : l'appareil psychique est essentiellement constitué de l'inconscient, fait de désirs refoulés. Freud parle de « ça » pour désigner le réseau désordonné et inconscient des pulsions qui déterminent les actes et les pensées.

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Le devoir de l'homme est donc de chercher la vérité sur soi. C'est pourquoi Freud crée la psychanalyse : la méconnaissance de soi n'est une fatalité car la psychanalyse a pour but d'analyser l'inconscient, pour mieux connaître les éléments qui influencent nos actes et nos pensées. Ainsi, l'homme peut mieux se connaître et retrouver son moi : « Là où était le ça, le je doit advenir » (Wo Es war Soll Ich werden). Il serait donc un devoir pour l'homme de chercher la vérité sur soi.

III Mais pour certains, il faut justement éviter de rechercher la vérité : il ne s'agit pas d'un devoir mais au contraire d'une erreur

Recherche de la vérité contre action directe : pragmatisme et utilitarisme

A Il faut privilégier l'action à la recherche systématique de la vérité
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Avant tout, la recherche systématique de la vérité aurait pour conséquence de négliger l'action directe et l'efficacité. En effet, on peut en arriver à se créer des problèmes et des exigences non nécessaires, puisqu'on privilégie même les vérités inutiles. Au contraire, il ne faudrait se concentrer que sur les vérités purement utiles, car l'intérêt de la vérité est strictement son efficacité.

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C'est notamment ce que défend le pragmatisme. Cette doctrine, fondée au début du XXe siècle par William James, prend pour critère de vérité le fait de fonctionner réellement, de réussir pratiquement. Par exemple, l'idée de Dieu est vraie uniquement si l'on peut en tirer profit. C'est donc une « preuve par l'efficacité ». James dit ainsi : « Le vrai consiste simplement dans ce qui est avantageux pour la pensée » (Le Pragmatisme, William James, 1907). Il ne faudrait donc pas poursuivre la vérité systématiquement, mais uniquement si on en tire avantage. L'important est l'action efficace.

B Il faut privilégier d'autres valeurs que le Vrai
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La recherche de la vérité risque également de détourner d'autres valeurs, qui sont tout aussi importantes voire plus. La morale a surtout pour objet le Bien plutôt que le Vrai. De plus, le but de l'existence peut être vu comme le bonheur (le Souverain Bien) ou le plaisir plutôt que comme la vérité.

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Nietzsche dénonce ainsi la position socratique, qui affirme que la vérité est le but de l'existence : « l'énonciation de la vérité à tout prix est socratique ». En détournant des autres valeurs, elle détournerait de la vie.

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L'art est un exemple de domaine où la recherche de la vérité n'a pas lieu d'être. En effet, l'art consiste justement à inventer, à dépasser les cadres, à s'éloigner de la réalité : le Beau nécessite d'abandonner le Vrai. Nietzsche critique ainsi la philosophie de Platon, qui rejette l'art en tant que source d'illusion (Platon dit dans la République que les artistes doivent être chassés de la cité car ils « ne créent que des fantômes et non des choses réelles »). Il faudrait parfois savoir négliger la recherche de la vérité.

C La recherche de la vérité conduit à des travers
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Enfin, si la recherche de la vérité ne peut pas être considérée comme un devoir, c'est parce qu'elle conduit à des dérives et au désespoir : la vérité peut être vue comme une folie qui n'existe pas.

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Pour Nietzsche, la vérité n'est qu'une illusion qui sert de consolation aux hommes et qui a été inventée par la métaphysique et la religion.La vérité serait donc une « nécessité vitale » mais surtout une erreur fondamentale. Paradoxalement, croire en la vérité serait en fait une illusion.

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Nietzsche s'interroge ainsi sur la valeur qu'il faut accorder à la recherche de la vérité. Vouloir la vérité à tout prix est une exigence discutable, carl'amour de la vérité n'est pas toujours raisonnable. Cela peut en effet produire des monstres, comme le fanatisme ou le dogmatisme qui n'admettent pas que l'on discute une vérité.

CONCLUSION

A première vue, la recherche de la vérité relève plutôt du désir que du devoir. C'est pourquoi on peut même choisir de vivre sans la vérité, en se contentent de l'ignorance et de la croyance. Toutefois, certains affirment que l'homme a le devoir moral de quitter l'illusion et de rechercher la vérité. Il s'agirait en effet d'un idéal qui a une valeur en soi, notamment pour réaliser son humanité et pour être maître de soi-même. Mais, pour certains, il faudrait au contraire éviter de rechercher la vérité : il ne s'agit pas d'un devoir mais d'une erreur qui peut mener à des dérives et des déceptions. Si la recherche de la vérité est considérée comme un devoir moral, cela pose le problème de son origine. Certains défendraient ainsi une exigence rationnelle tandis que d'autres invoqueraient une contrainte sociale.
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