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 DU BREVET AU BAC :: ROUSSEAU :: Discours sur le fondement de l'inégalité, la perfectibilité

Discours sur le fondement de l'inégalité, la perfectibilité

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MessageSujet: Discours sur le fondement de l'inégalité, la perfectibilité  Posté leSam Oct 03, 2015 6:26 pm Répondre en citant

La perfectibilité (étude d'un texte de Jean Jacques Rousseau )

"Mais, quand les difficultés qui environnent toutes ces questions, laisseraient quelque lieu de disputer sur cette différence de l'homme et de l'animal, il y a une autre qualité très spécifique qui les distingue, et sur laquelle il ne peut y avoir de contestation, c'est la faculté

de se perfectionner ; faculté qui, à l'aide des circonstances, développe successivement toutes les autres, et réside parmi nous tant dans l'espèce, que dans l'individu, au lieu qu'un animal est, au bout de quelques mois, ce qu'il sera toute sa vie, et son espèce, au bout de mille ans, ce qu'elle était la première année de ces mille ans. Pourquoi l'homme seul est-il sujet à devenir imbécile ? N'est-ce point qu'il retourne ainsi dans son état primitif, et que, tandis que la Bête, qui n'a rien acquis et qui n'a rien non plus à perdre, reste toujours avec son instinct, l'homme reperdant par la vieillesse ou d'autres accidents, tout ce que sa perfectibilité lui avait fait acquérir, retombe ainsi plus bas que la Bête même ? Il serait triste pour nous d'être forcés de convenir, que cette faculté distinctive, et presque illimitée est la source de tous les malheurs de l'homme ; que c'est elle qui le tire à force de temps, de cette condition originaire, dans laquelle il coulerait des jours tranquilles et innocents ; que c'est elle, qui faisant éclore avec les siècles ses lumières et ses erreurs, ses vices et ses vertus le rend à la longue le tyran de lui-même et de la Nature."

Jean-Jacques ROUSSEAU,

Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes (1755).

Gallimard.

Explication

La question traitée ici par Rousseau est celle de la différence entre l'homme et l'animal, selon lui, si en de nombreux points la question est difficile à résoudre, il en est un qui ne fait aucun

doute et qui permet de marquer la différence essentielle entre l'homme et l'animal, c'est la faculté de se perfectionner qu'il nomme perfectibilité.

Cette faculté permet à l'homme d'acquérir des facultés qui n'apparaissent pas initialement et spontanément en lui, ces facultés ne naissent qu'à la suite d'une stimulation extérieure, que si elles sont, comme l'écrit Rousseau, suscitées "à l'aide des circonstances".

1°partie

Dans un premier temps (du début à "... la première année de ces mille ans"), Rousseau commence par évacuer tous les autres points au sujet desquels la question de la différence entre

l'homme et l'animal pourrait porter à discussion

"Mais, quand les difficultés qui environnent toutes ces questions, laisseraient quelque lieu de disputer sur cette différence de l'homme et de l'animal,...",

pour ensuite affirmer que le seul caractère distinctif qui ne fasse aucun doute est "la faculté de se perfectionner".

Cette faculté Rousseau la définit ensuite de la manière suivante :

"faculté qui, à l'aide des circonstances, développe successivement toutes les autres, et réside parmi nous tant dans l'espèce, que dans l'individu, au lieu qu'un animal est, au bout de quelques mois, ce qu'il sera toute sa vie, et son espèce, au bout de mille ans, ce qu'elle était

la première année de ces mille ans."

Il convient donc pour bien comprendre en quoi consiste cette faculté d'expliciter précisément chaque élément de cette définition.

"faculté qui, à l'aide des circonstances, développe successivement toutes les autres"

Ici Rousseau insiste sur le fait que cette faculté permet de développer en l'homme des facultés qui ne se manifestent pas en lui naturellement, dès la naissance, mais qui n'apparaissent qu'en

fonction des situations et des besoins auxquels il se trouve confronté. En quelque sorte l'homme possède en lui de nombreuses facultés sous forme de potentialités, mais celles-ci ne se développent pas nécessairement, elles ne le feront que si les circonstances le

demandent, c'est-à-dire, si le milieu extérieur exige une telle évolution.

La perfectibilité est donc en quelque sorte "la faculté des facultés", la faculté qui permet le développement de toutes les autres, la faculté qui conditionne toutes les autres.

Cette faculté " réside parmi nous tant dans l'espèce, que dans l'individu", c'est-à-dire qu'elle rend possible aussi bien l'évolution de l'humanité toute entière (l'espèce), que celle de chacun d'entre nous (l'individu).

Cette faculté est donc celle qui permet une évolution propre à l'homme et dont aucun animal n'est capable, ce qui explique que, seul (nous ne parlons pas ici de l'animal domestique qui évolue

grâce à l'homme), l'animal est incapable de progresser ("un animal est, au bout de quelques mois, ce qu'il sera toute sa vie, et son espèce, au bout de mille ans, ce qu'elle était la première année de

ces mille ans."), alors que l'homme est quant à lui en mesure de se transformer et de s'adapter aux diverses situations qu'il peut rencontrer.

2° partie

Cependant, si la perfectibilité est définie comme la faculté permettant le progrès de toutes les autres, l'argument utilisé par Rousseau dans la seconde partie du texte, pour justifier son existence, peut sembler contradictoire. En effet Rousseau écrit : "Pourquoi l'homme seul est-il sujet à devenir imbécile ?", il semblerait que la capacité de l'homme à se perfectionner se trouve attestée, confirmée, par sa capacité à devenir imbécile. L'imbécillité est pourtant une imperfection,

comment une telle imperfection peut-elle être considérée comme un gage de perfectibilité ?

C'est que précisément la perfectibilité n'est pas la perfection, elle est même plutôt le signe de l'imperfection humaine ; si l'homme a besoin de se perfectionner, d'acquérir de nouvelles facultés, n'est-ce pas parce qu'il est imparfait ? Un être parfait, n'a, quant à lui, aucune raison d'évoluer, de se parfaire.

De ce point de vue, l'animal est peut-être, en un certain sens plus parfait que l'homme, dans la mesure où il est parfaitement adapté par la nature à son milieu.

En revanche, c'est parce que l'homme est inadapté, imparfait qu'il doit sans cesse acquérir de nouvelles qualités, mais le problème vient ensuite de ce que ces qualités étant acquises, elles ne

s'inscrivent pas définitivement dans la nature de l'homme, elles ne deviennent pas un composant essentiel de son être et donc il risque à tout moment de les perdre.

"N'est-ce point qu'il retourne ainsi dans son état primitif, et que, tandis que la Bête, qui n'a rien acquis et qui n'a rien non plus à perdre, reste toujours avec son instinct, l'homme reperdant par la vieillesse ou d'autres accidents, tout ce que sa perfectibilité lui avait fait acquérir, retombe ainsi plus bas que la Bête même ?"

3° partie

C'est pourquoi dans la dernière partie du texte Rousseau insiste sur le caractère corrupteur de cette perfectibilité, car au lieu de rendre l'homme nécessairement meilleur, elle peut aussi contri-

buer à le rendre mauvais, à le dénaturer, à lui faire perdre son innocence originelle :

"Il serait triste pour nous d'être forcés de convenir, que cette faculté distinctive, et presque illimitée est la source de tous les malheurs de l'homme ; que c'est elle qui le tire à force de temps, de cette condition originaire, dans laquelle il coulerait des jours tranquilles et

innocents ; que c'est elle, qui faisant éclore avec les siècles ses lumières et ses erreurs, ses vices et ses vertus le rend à la longue le tyran de lui-même et de la Nature."

En effet en développant sa perfectibilité, l'homme s'est en quelque sorte laissé enivrer par la puissance qu'il peut exercer sur le monde et sur lui-même et en est arrivé parfois à se rendre plus malheureux que ne l'avaient rendu les raisons qui l'avaient initialement conduit à mettre en œuvre de nouvelles facultés.

Conclusion

Ainsi l'homme ne naît pas achevé, il doit cultiver, pour s'adapter à son milieu, toutes les facultés que la nature a laissé en sommeil en lui, cette perfectibilité le rend certes plus puissant que les autres êtres vivants, mais elle le rend aussi plus libre, c'est pourquoi Rousseau nous met ici en garde contre les effets destructeurs de cette faculté qui rend l'homme capable du meilleur comme du pire.

"c'est elle qui le tire à force de temps, de cette condition originaire, dans laquelle il coulerait des jours tranquilles et innocents ; que c'est elle, qui faisant éclore avec les siècles ses lumières et ses erreurs, ses vices et ses vertus le rend à la longue le tyran de lui-même et de la Nature."
_________________
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Lycée, séries générales et technologiques
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