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 DU BREVET AU BAC :: LECTURES ANALYTIQUES ET COMMENTAIRES :: Jeannot et Colin, "Monsieur voulait.... son avis"

Jeannot et Colin, "Monsieur voulait.... son avis"

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Prépabac, examen2017
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MessageSujet: Jeannot et Colin, "Monsieur voulait.... son avis"  Posté leSam Mar 02, 2013 1:46 pm Répondre en citant

Voltaire, Jeannot et Colin



*** Séquence argumentation






Lecture analytique: préparation orale en ligne






Lecture du texte :



" Monsieur voulait que son fils apprit le latin, madame ne le voulait pas. Ils prirent pour arbitre un auteur qui était célèbre alors par des ouvrages agréables. Il fut prié à dîner. Le maître de la maison commença par lui dire d'abord : " Monsieur, comme vous savez le latin, et que vous êtes un homme de la cour... - Moi, monsieur, du latin ! je n'en sais pas un mot répondit le bel esprit et bien m'en a pris ; il est clair qu'on parle beaucoup mieux sa langue quand on ne partage pas son application entre elle et les langues étrangères. Voyez toutes nos dames, elles ont l’esprit plus agréable que les hommes ; leurs lettres sont écrites avec cent fois plus de grâce ; elles n'ont sur nous cette supériorité que parce qu'elles ne savent pas le latin.
– Eh bien ! n’avais-je pas raison ? dit madame. Je veux que mon fils soit un homme d’esprit, qu'il réussisse dam le monde ; et vous voyez bien que, s'il savait le latin, il serait perdu. joue-t-on, s'il vous plaît, la comédie et l’opéra en latin ? Plaide-t-on en latin quand on a un procès ? Fait-on l’amour(1) en latin " Monsieur, ébloui de ces raisons, passa condamnation(2), et il fut conclu que le jeune marquis ne perdrait point son temps à connaître Cicéron, Horace et Virgile. " Mais qu'apprendra-t-il donc ? car encore faut-il qu'il sache quelque chose ; ne pourrait-on pas lui montrer un peu de géographie ? – A quoi cela lui servira-t-il ? répondit le gouverneur. Quand monsieur le marquis ira dans ses terres, les postillons(3) ne sauront-ils pas les chemins ? ils ne l’égareront certainement pas. On n'a pas besoin d’un quart de cercle pour voyager, et on va très commodément de Paris en Auvergne, sans qu'il soit besoin de savoir sous quelle latitude on se trouve.
– Vous avez raison, répliqua le père ; mais j'ai entendu parler d'une belle science qu'on appelle, je crois, ]'astronomie. – Quelle pitié ! repartit le gouverneur; se conduit-on par les astres dans ce monde ? et faudra-t-il que monsieur le marquis se tue à calculer une éclipse, quand il la trouve à point nommé dans l’almanach, qui lui enseigne de plus les fêtes mobiles, l'âge de la lune, et celui de toutes les princesses de l’Europe ? "
Madame fut entièrement de l’avis du gouverneur. Le petit marquis était au comble de la joie; le père était très indécis. " Que faudra-t-il donc apprendre à mon fils ? disait-il – À être aimable, répondit l’ami que l’on consultait (4) ; et s'il sait les moyens de plaire, il saura tout : c'est un art qu'il apprendra chez madame sa mère, sans que ni l’un ni l’autre se donnent la moindre peine. "
Madame, à ce discours, embrassa le gracieux ignorant, et lui dit . " On voit bien, monsieur que vous êtes l'homme du monde le plus savant ; mon fils vous devra toute son éducation: je m’imagine pourtant qu'il ne serait pas mal qu’il sût un peu d'histoire. – Hélas madame, à quoi cela est-il bon ? répondit-il ; il n'y a certainement d'agréable et d'utile que l’histoire du jour. Toutes les histoires anciennes, comme le disait un de nos beaux esprits, ne sont que des fables convenues ; et pour les modernes, c'est un chaos qu'on ne peut débrouiller. Qu'importe à monsieur votre fils que Charlemagne ait institué les douze pairs de France, et que son successeur ait été bègue.
– Rien n'est mieux dit ! s'écria le gouverneur : on étouffe l'esprit des enfants sous un amas de connaissances inutiles ; mais de toutes les sciences la plus absurde, à mon avis, et celle qui est la plus capable d'étouffer toute espèce de génie, c'est la géométrie. Cette science ridicule a pour objet des surfaces, des lignes, et des points, qui n'existent pas dans la nature. On fait passer en esprit cent mille lignes courbes entre un cercle et une ligne droite qui le touche, quoique dans la réalité on n'y puisse pas passer un fétu. La géométrie, en vérité, n'est qu’une mauvaise plaisanterie. "
Monsieur et madame n'entendaient pas trop ce que le gouverneur voulait dire ; mais ils furent entièrement de son avis.

VOLTAIRE, Jeannot et Colin (1764) (Editions Garnier, pp. 130-132) "





I-L'art d'animer le récit

1- Le discourt direct


Style vivant avec ponctuation importante : 5 points d’exclamation et 10 points d'interrogation. Extrait facile à transposer en scène de théâtre, indications scéniques avec didascalies L° 65/66 « le petit marquis était au comble de la joie », « le père était très indécis ». Allègement du style avec parataxe (juxtaposition de 2 propositions sans connecteurs logiques ou temporels) « Monsieur voulait que son fils appris le latin, madame ne le voulais pas. » = 2 verbes conjugués donc juxtaposition, aucun connecteurs logique marquant l'opposition des 2 propositions, la même thèse est développée tout au long de l'extrait mais étant donné la variété des sciences proposées, ils doivent à chaque fois trouver de nouveaux arguments.

2- L'opposition des personnages donne une dynamique au récit

L'invité contredit le père sur le latin, le gouverneur contredit le père sur l'astronomie et la géographie,et le gouverneur contredit la mère sur l'histoire. Élément important : Père et mère se contredisent entre eux, cette opposition est marquée par l'antithèse présente dès le début du récit avec la répétition du verbe « voulait» à la forme affirmative puis négative ( là où réside l'antithèse) + et -. La mère entend imposer son point de vue à son mari « je veux que mon fils » : reprise du verbe vouloir, à la première personne, et tête de phrase. Forme interrogative employée par le père et la mère ce qui révèle leur opposition. Phrases interrogatives de la mère sont toutes des questions rhétoriques, ce qui montre qu'elle est sure d'elle et qu'elle ne se pose en vérité aucune questions L°75 « Joue-t-on[...] amour en latin ? ». Contrairement au père qui pose de vraie questions « qu'apprendra-t-il donc ? », le père n'affirme rien, ses réactions montrent qu'il se remet en question « il passa condamnation » : il reconnaît ses torts « il était très indécis ». La mère est sure d'avoir raison et pose de fausses questions, le père doute et pose donc de vraies questions. Preuve de la timidité du père qui n'ose rien affirmer « ne pourrait-on pas lui... » : question+ conditionnel= timidité. Ahi attitude du gouverneur et celle de l'invité aussi qui montre une forte assurance : 4 questions rhétoriques, expression assertive « il est claire que », et tournures restrictives « la géométrie n'est qu'en vérité une mauvaise plaisanterie » ( négation restrictive) Emploi du présent de vérité générale comme une vérité universelle « se conduit-on par les astres

3 – Le comique permet aussi d’agrémenter la lecture du texte

Comique de situation : l'auteur invité et le gouverneur sont censés être des intellectuels or ils dénigrent toutes les sciences, cela engendre un comique de répétition. Dès que loes parents proposent une science, leur proposition est rejetée. Ils soutiennent que l'ignorance est supérieure au savoir= Paradoxe. Et associent dans leur discours des termes contradictoires aux yeux du narrateur « on étouffe l'esprit » or le savoir devrait le développer. « inutile » « géométrie » sont associés à « sciences ridicule » et « mauvais plaisanterie »= termes contradictoires. Leur réaction consternée lorsqu'on leur parle d'une science est comique « quelle pité », « hélas » interjection exclamative.

II- Voltaire défend l'importance de la culture

1-Les commentaires du narrateur

Élément 1= antithèse « il fut conclu que le jeune marquis ne perdrait point son temps à connaître Cicéron, Horace, et Virgile. ». Le narrateur utilise les auteurs les plus connus pour designer le latin et c'est pour en fait valoriser le latin. Élément 2= Antiphrase «le bel ésprit » pour celui qui ne sait pas un mot de latin. Élément 3= Oxymore « le gracieux ignorant ». Element 4= Ironie perceptible dans l'expression « un auteur célèbre par des ouvrages agréables » ( ouvrages intellectuels) + ironie « Monsieur et Madame n'entendaient pas trop ce qu'il voulait dire ; mais ils furent entièrement de son avis. « . Le lecteur est donc mis en garde contre le discours des deux charlatant. La thèse énoncée est la suivante : IL ne faut pas enseigner des sciences exactes ou Humaines sous prétexte qu'elles ne sont pas utiles. Cette thèse énoncée est donc écartée. Champs lexical de l'utilité : « besoin ; importe ... » dénonce une vision utilitariste de la culture. Voltaire nous fait comprendre par l'antiphrase ce qui permet à un homme de s’élever et de s'épanouir, c'est le savoir et la capacité d'abstraction. Cela permet de ne pas dépendre d’autrui, ce que vient enseigner la fin du conte : Les Jeannotière sont ruinés pour ne pas avoir su gérer leur argent.

2- Voltaire met en garde les beaux-parleurs qui manipulent les esprits

-Madame de la J° est d'abord manipulée an tant que femme « nos dames ont l’esprit + agréable que nos hommes »= basse flatterie. « Plus...que »= comparatif de supériorité. « lettres écrites avec cent fois plus de garce »= grosse exagération, hyperbole.

-Flatterie en tant que mère ( passage où elle parle de l'éducation)

-Faletterie à propos de leur snobisme « madame sa mère », « monsieur votre fils » « monsieur le marquis ».

3- Voltaire critique une société où l'art de plaire prend le pas sur l'art de bien penser :

La mère rejette le latin (art grammatical) car elle lui préfère la vie mondaine, les sorties théâtrales ouàl'opéra. Sachant que le latin est un passage obligatoire lorsqu'on devait faire des études à cette époque). Champs lexical de l'art de plaire : « agréable » *2 ; « bel esprit » ; « gracieux »... la mère nous dit même « un homme d’esprit est un homme qui réussisse dans le monde »= qui brille en société. Encore une fois la seul valeur est le paraître au détriment de l'être.

Conclusion


Ce texte est une très belle illustration de l'écriture Voltairienne qui défend sa thèse par des arguments contraires. Le lecteur à une certaine satisfaction à comprendre entre les lignes, et de ce sentir complice du narrateur, Voltaire. Et de ce fait s e sentir supérieur aux personnages de cette scène. C'est un débat sur la vision utilitaire de la culture et c'est toujours d'actualité ( ex:diminution des options, on se pose la question sur celle du latin ; diminution de l'enseignement : histoire-géo... C'est la rentabilité contre l'utilité)
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Dernière édition par Prépabac, examen2017 le Lun Mar 11, 2013 4:05 pm; édité 1 fois

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