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 DU BREVET AU BAC :: ETUDE D'UN PHILOSOPHE :: KANT

KANT

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MessageSujet: KANT  Posté leLun Oct 18, 2010 12:07 pm Répondre en citant

Le texte suivant est tiré de Perspectives : revue trimestrielle d’éducation comparée
(Paris, UNESCO : Bureau international d’éducation), vol. XXIII, n° 3-4, 1993, p. 813-830.
©UNESCO : Bureau international d’éducation, 2000


EMMANUEL KANT
(1724 – 1804)
Heinrich Kanz1




A Königsberg, aujourd’hui dénommée Kaliningrad, en cette ville où Kant est né, où il a enseigné et
où il est mort, et qui fut détruite à 90 % en 1944-1945, on ne trouvera aujourd’hui ni sa maison
natale ni celle où il est mort. Mais il y a un musée Kant à l’université, et il reste à l’une des
extrémités de la cathédrale de Königsberg, maintenant en ruines, une tombe bien entretenue qu’on
peut considérer comme un lieu de souvenir et aussi comme un monument de la réconciliation
intellectuelle qui se manifeste actuellement dans le monde et nous fait honorer la mémoire de l’un
des plus grands philosophes allemands depuis l’époque des Lumières. Kant peut être en effet
considéré comme l’un des grands représentants de la philosophie européenne dans son expression
germanique depuis le XVIIIe siècle.
Les spécialistes de l’histoire de la culture allemande appellent le XVIIIe siècle « le siècle
pédagogique ». Kant a eu lui aussi des préoccupations d’ordre pédagogique. Cependant, c’est
uniquement dans le cadre de sa philosophie que l’on peut les apprécier. Aussi a-t-il plutôt sa place
dans une histoire de la « philosophie pédagogique », ou d’une philosophie de la formation et de
l’éducation. Il n’est donc pas étonnant qu’il ne figure pas au nombre des « Classiques de la
pédagogie » dans l’ouvrage bien connu de Scheuerl, bien qu’il soit cité dans l’introduction2 aux
côtés de Luther, Mélanchthon, Friedrich August Wolf et Schiller. Il se peut que dans don
interprétation des classiques de la pédagogie, cet ouvrage ait été inspiré par un souci excessif de
garder ses distances à l’égard de cette base scientifique de la pédagogie que constitue la
philosophie. D’autres traditions pédagogiques, en revanche, mentionnent explicitement
l’importance de Kant comme pédagogue. « Kant et la pédagogie », tel fut en 1954 l’un des thèmes
traités par Bollnow3, philosophe de l’existence bien connu et « auteur pédagogique », qui remonte
ainsi une ligne qui, à l’évidence, va de Kant à la pédagogie du XXe siècle.
Ce paraît être l’une des tâches de l’heure présente que de favoriser la rencontre
intellectuelle des continents. Cela n’ira pas sans un effort de définition du profil et de la véritable
identité historique des groupes ou d’ensembles plus importants tels que l’Afrique, l’Amérique,
l’Asie, l’Australie ou l’Europe. S’agissant de l’Europe, cette exigence implique que les Européens
se rappellent les compétences humaines qu’ils possèdent et dont eux-mêmes ou les autres peuvent
tirer profit, qu’ils réexaminent leur histoire afin de pouvoir faire le bilan des facteurs négatifs ou
positifs. En outre, chaque continent doit fournir, dans une démarche pluraliste, individuelle et
concrète, sa contribution à la nouvelle éthique mondiale. Aussi faut-il se demander quels sont les
acquis intellectuels que l’Europe doit à Kant, et qui feront d’elle un membre de plein droit dans la
société mondiale de demain, notamment, pour ce qui est du domaine pédagogique. Aussi
retiendrons-nous pour notre profil de « Kant, éducateur », un plan en cinq parties : données
bibliographiques, position en matière de pédagogie, méthodes, influence et contributions durables
(ce qui nous servira en même temps de conclusion).
2
Données bibliographiques

De notre point de vue actuel, on peut distinguer le Kant des philosophes professionnels4, le Kant du
monde scientifique5 et le Kant des chercheurs de l’éducation et des pédagogues6. Le rappel de
certaines données de sa carrière professionnelle ayant trait à ce domaine particulier fait clairement
apparaître les compétences et l’importance de Kant en matière de pédagogie.
Immanuel Kant8 est né à Königsberg le 22 avril 1724. Ses parents, de condition modeste,
n’en ont pas moins élevé leur fils de telle façon que celui-ci leur garda un sentiment de « profonde
reconnaissance » et assura qu’il n’aurait pu recevoir meilleure éducation morale. Les compétences
culturelles de base, la lecture et l’écriture, il les acquit à la Hospitalschule, dans un faubourg de la
ville. Puis il fréquenta le Collegium Fridericianum, où les principales matières enseignées étaient le
latin (les classiques), le grec (le Nouveau Testament), ainsi que la religion et la théologie, dont la
présence constante dans l’enseignement et la vie scolaire, certes, lui pesa, mais assura les bases de
ce qui fut par la suite sa religion personnelle, conciliable avec la raison. A l’âge de seize ans, en
1740, Kant s’inscrivit à l’université de Königsberg où il peut se familiariser avec la philosophie de
Leibniz). Au cours des années suivantes, il instruisit et éduqua, en qualité de précepteur, des
garçons de moins de douze ans. En 1755, il fut reçu docteur de l’université de Königsberg, et fut
autorisé, cette année, à enseigner en tant que Privatdozent ou maître de conférences non rémunéré.
En cette qualité il analysa les oeuvres de Newton, de Hume surtout Rousseau, qui, selon ses propres
termes, le mit « sur le droit chemin », et provoqua chez lui une « révolution de la réflexion ». Cette
situation de maître de conférences , partiellement financée par son salaire de sous-bibliothécaire à la
Bibliothèque royale de Königsberg, prit fin en 1770 avec sa nomination à une chaire de professeur
titulaire de logique et de métaphysique (sa leçon inaugurale eut pour titre : « Sur la forme et des
principes du monde des sensible et du monde intelligible). La carrière professorale de Kant le mena
à la tête des intellectuels de langue allemande. Au cours de son existence vouée au savoir (il fut
aussi recteur de l’université en 1786 et 1788), il rédigea les oeuvres philosophiques majeures de son
époque (voir liste des oeuvres en fin d’article).
Débattant avec ceux qui faisaient autorité dans l’Europe intellectuelle de son temps, Kant
écrivit, outre de nombreux textes mineurs, sa célèbre Réponse à la question : Qu’est-ce que les
Lumières ? (1784). Il fit son dernier cours en 1796, et mourut en 1804. Ses derniers mots furent :
« C’est bien ». Le déisme qu’il professait en matière de religion l’avait affranchi de l’angoisse de la
mort.
Qui veut tenter de résumer les préoccupations intellectuelles de Kant en quelques formules
lapidaires peut se référer aux questions, universellement connues par la suite, qu’il posa en 1793 :
Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que m’est-il permis d’espérer Qu’est que l’homme ? Les
problèmes qu’elles recèlent, Kant s’en saisit, avec un esprit critique et en en recherchant très loin les
prémisses, à deux niveaux de réflexion :
Tout d’abord il procéda, avec le positivisme propre à l’esprit des Lumières, à l’examen de
la raison humaine, la soumettant à une auto-évaluation rationnelle des possibilités qu’elle ouvre à
l’homme et de ses limites. C’est dans cette perspective que se situe l’extraordinaire « modestie »
critique et la limitation aux expériences possibles à tout homme (« phénomènes ») qui caractérisent
la Critique de la raison pure où, poussant jusqu’à l’absurde les soi-disant preuves de l’idéologie,
Kant établit l’impossibilité d’une connaissance scientifique des choses en soi (Noumena).
Mais aussi, dépassant le stade de ce jugement plutôt réservé à l’égard de la raison humaine,
Kant ouvre des perspectives sur l’importance morale qu’ont pour l’homme la liberté, l’immortalité
et l’accomplissement religieux. Kant lui-même croyait, dans sa Critique de la raison pure de 1781
(II. Théorie transcendantale de la méthode, Chapitre II, Troisième section : De l’opinion, du savoir
et de la foi) « inévitablement à l’existence de Dieu et à une vie future »7. La foi en « Dieu, la liberté
et l’immortalité », qui apporte aux hommes le bonheur et fonde la paix sur terre, ne saurait
3
cependant, selon Kant, être (« dogmatiquement ») fondée en raison et érigée en doctrine ou
idéologie. Aussi sa critique met-elle en garde contre l’idée qu’il serait possible de procéder en la
matière par démonstration. Cela reviendrait en effet à nier la liberté de l’esprit humain. C’est en ce
sens que Kant avait critiqué la raison dans la Préface de la seconde édition (1787) de la Critique de
la raison pure : « Je devais donc supprimer le savoir, pour trouver une place pour la foi »9, c’est-àdire
pour ouvrir la voie à des certitudes morales correspondantes, au niveau de l’existence humaine.
La raison pure « ouvre des vues sur des articles de foi »10, ni plus ni moins.
Kant a ainsi revendiqué sans ambiguïté la liberté humaine et, respectant la dignité humaine,
renvoyé l’aperception de cette liberté au domaine de la subjectivité, dont il est principalement traité
dans la Critique de la raison pratique (1788). La conclusion de cette Critique commence en ces
termes : « Deux choses remplissent le coeur d’une admiration et d’une vénération toujours
nouvelles et toujours croissantes, à mesure que la réflexion s’y attache et s’y applique : le ciel étoilé
au-dessus de moi et la loi morale en moi »11.
Kant et l’éducation
L’importance accordée à la subjectivité est l’un des principes de la pédagogie mondiale actuelle.
Celle-ci définit les acteurs du processus de formation/éducation comme des sujets auxquels il est
interdit de s’instrumentaliser réciproquement. Or, que tous les hommes soient des sujets qui ne
devraient pas se considérer les uns les autres comme moyens, voilà qui semble bien constituer la
quintessence de la philosophie kantienne. C’est ce dont, au sein du mouvement pédagogique
mondial, la pédagogie européenne moderne lui sait gré. Mais ceux qui considèrent la philosophie
kantienne d’un point de vue pédagogique, qui s’interrogent sur les enseignements à en tirer de ce
point de vue, n’en sont pas réduits à déceler des implications pédagogiques immanentes : il/elle peut
aussi se référer à des propos ayant trait directement à la pédagogie.
Les intellectuels allemands qui, au XVIIIe siècle, donnaient le ton, disposaient d’organes
d’expression connus, comme la Berlinische Monatsschrift [Le mensuel berlinois]. Il s’y faisait un
échange très actif d’opinions sur toutes les questions du temps et, entre autres, sur les problèmes
touchant à la formation et à l’enseignement. En 1776-1777, Kant s’exprime dans les Königsberger
Gelehrte und Politische Zeitungen [Journaux savants et politiques de Königsberg] à propos de la
célèbre école innovatrice des philanthropes de Dessau. Il lui prête une importance cosmopolite,
révolutionnaire et continentale. « Il est du plus haut intérêt pour toute collectivité, pour tout citoyen
du monde, de faire connaissance d’un établissement par lequel va s’instaurer un tout nouvel ordre
des choses ». Le Philanthropinum de Basedow à Dessau devrait « de toute nécessité [¼ ] attirer
l’attention de l’Europe ». Dans les pays civilisés d’Europe devrait, par une « rapide révolution »,
s’engager la réforme attendue de l’école. Or, cette révolution, « l’Institut d’éducation de Dessau (le
Philanthropinum) » l’engage et la concrétise excellemment12.
Kant s’est explicitement interrogé sur la didactique de son enseignement universitaire. Il
s’est efforcé d’avoir à l’égard de ses auditeurs un comportement éducatif. Ce souci s’exprime dans
la façon dont sont annoncés ses cours pour –1765-1766. Il se propose de faire de ses auditeurs des
hommes sensés, raisonnables et instruits. Il veut former la jeunesse qui lui est confiée afin qu’elle
« acquière un jugement personnel plus accompli à l’avenir »13.
Kant donne des « cours de pédagogie »14 durant le semestre d’hiver 1776-1777, le semestre
d’été 1780, et durant les semestres d’hiver 1783-1784 et 1786-1787. Il ne les a pas publiés luimême,
mais le Dr. Friedrich Theodor Rink devait s’en charger en 1803, chez l’éditeur Nicolovius à
Königsberg. On peut admettre qu’y sont rassemblées les idées essentielles de Kant en matière
d’éducation.
En sa qualité de professeur de la faculté de philosophie, il était tenu de faire en
alternance un cours de pédagogie. Il pouvait s’appuyer en cela sur le Manuel d’art de
4
l’éducation de son ancien collègue D. Bock, conseiller au consistoire. Lui a-t-il beaucoup
emprunté ? C’est une question à laquelle il est difficile de répondre, et qui se pose d’ailleurs à
propos de l’ensemble de son oeuvre. On peut considérer la présentation que fait Rink des
Propos de pédagogie de Kant comme une résultante de différents états de la réflexion
kantienne. A la lecture, on est naturellement amené à se demander ce qu’il faut imputer aux
périodes critique ou pré-critique. Il n’en demeure pas moins qu’on distingue très clairement les
idées essentielles du philosophe Kant en matière de pédagogie, telles qu’il les a lui-même
conçues ou qu’elles résultent du débat avec d’autres intellectuels de son temps.
Il est intéressant de comparer les conceptions formulées par Kant au cours des leçons de
pédagogie auxquelles il était astreint avec les considérations d’ordre pédagogique formulées dans
des ouvrages de la même époque ou plus tardifs, et notamment dans des textes plus ou moins
importants traitant d’éthique, d’esthétique, d’histoire, d’anthropologie ou de théologie. Citons en
particulier, outre ces classiques que constituent les trois Critiques : « Idée d’une histoire générale
pour un citoyen du monde » (Berlinische Monatsschrift, 1784), « Conjectures sur le
commencement de l’histoire humaine » (ibid., 1786), « Qu’est-ce que les Lumières ? » (ibid.,
1784), Paix perpétuelle (1795) et L’Anthropologie d’un point de vue pragmatique (1798)15. On se
référera également avec profit à l’ouvrage fondamental de 1793 sur la philosophie de la
religion intitulé : La religion dans les limites de la simple raison, en particulier en ce qui concerne
le problème du bien et du mal chez l’homme et la réponse qu’y apporte l’éducation16. C’est là que
l’on trouve la formule : « Ce que l’homme est ou peut-être destiné à devenir, au sens moral, bon ou
mauvais, il ne le doit qu’à lui-même, maintenant comme autrefois17. »
La version imprimée dont nous disposons sur le cours de pédagogie de Kant (1976-1977,
1980, 1786-1787) (voir note 5) diffère par sa forme littéraire de ses autres oeuvres. Ce qu’a publié
Rink, est un compendium d’axiomes, devises et thèses, plutôt qu’un exposé logiquement organisé.
Mais ces considérations, qu’on peut qualifier de cumulatives, sur l’éducation et la pédagogie n’en
recèlent pas moins des vues encore intéressantes aujourd’hui, même si l’on y perçoit la
préoccupation de remettre en question des opinions qui avaient cours à l’époque en matière
d’éducation.
Nous allons donc nous efforcer de formuler ici quelque thèmes, hypothèses ou réflexions
susceptibles de constituer, pour la structure éducative universelle requise aujourd’hui, des
suggestions constructives. Vouloir faire de ces éléments un exposé procédant selon une logique
interne serait aller au-delà de ce qu’offre l’original, et relèverait davantage de l’interprétation. Il est
possible, en revanche, de poser quelques questions adéquates et de rechercher quelles réponses le
texte y apporte : Qu’est-ce que l’éducation ? A qui s’adresse t-te-elle ?. Quelle éducation faut-il
donner ou recevoir pour former des esprits éclairés et épris de paix ?
Qu’est-ce que l’éducation ?
L’idée pédagogique fondamentale de Kant, c’est que l’éducation est absolument nécessaire au
développement de l’humanité. C’est précisément parce que tous les hommes ont « un tel penchant
pour la liberté » qu’il faut les « accoutumer de bonne heure à se plier aux prescriptions de la
raison » (1963, p. 10) L’homme (terme générique) n’est rien que ce que l’éducation fait de lui.
« L’homme, il convient de le remarquer, ne reçoit son éducation que d’autres hommes éduqués par
les mêmes voies » (p. 11). L’éducation peut être, d’une part, étudiée d’un point de vue empirique,
c’est-à-dire telle qu’elle est effectivement mise en oeuvre dans la réalité, mais elle peut l’être aussi
du point de vue de ses fondements anthropologiques et de ce que doit être son idée normative. Or,
« une idée n’est rien d’autre que le concept d’une perfection encore absente dans l’expérience » (p.
12).
C’est l’idée de l’éducation qui fournit la norme de la pratique éducative. Elle rend possible
la critique de l’éducation, de la formation et de la scolarité. Même si elle n’est pas encore réalisée,
5
ou si elle ne peut, par principe, l’être qu’approximativement, « l’idée éducative développant toutes
les dispositions naturelles de l’homme “paraît être ” la vérité ».
C’est dans la réalisation d’une éducation bonne et véridique que « réside le grand mystère
de la vraie perfection de la nature humaine » (p. 12 et suiv.). Pour Kant, c’est « ravissement que de
se représenter la possibilité de toujours mieux développer la nature humaine par l’éducation, et de la
porter à une forme adéquate à l’humanité » (p. 12). Aussi un plan d’éducation doit-il être conçu
dans un esprit « cosmopolite » et avoir en vue « le plus grand bien universel » (p. 15).
« C’est d’une bonne éducation que naît tout le bien dans le monde » (p. 15). On peut dès
lors poser en principe qu’il ne faut « jamais éduquer les enfants en fonction du niveau présent, mais
en fonction du meilleur état éventuellement possible pour l’humanité, c’est-à-dire qu’il faut tenir
compte de l’idée de l’humanité et de sa destinée universelle » (p. 14).
L’un des reproches adressés par Kant à l’éducation pratiquée à son époque, et notamment à
l’éducation donnée dans les familles, c’est que les parents élèvent communément leurs enfants
« dans le seul dessein qu’ils s’adaptent au monde présent, fût-il corrompu » (p. 14). Alors que la
véritable éducation est en mesure d’améliorer progressivement le monde. Elle est une oeuvre qui
doit se parfaire à travers de multiples générations, dont chacune progressera vers la perfection de
l’humanité par un « développement gradué et conforme à cette fin » de toutes les dispositions
humaines naturelles. Il est donc juste de dire que le bonheur ou le malheur de l’homme dépend « de
lui-même ». « Aussi l’éducation est-elle le problème le plus grand, et le plus ardu, qui puisse se
poser à l’homme. Car la clarté de vue dépend de l’éducation, et l’éducation, à son tour, de la clarté
de vue » (p. 13). Pour Kant, il est si vrai que l’activité pédagogique fait partie intégrante de la vie
culturelle de l’humanité qu’il la compare à l’activité politique : « Il est deux inventions humaines
que l’on peut tenir sans doute pour les plus chargées de difficultés : celle de l’art de gouverner et de
l’art d’éduquer » (p. 14).
Pour Kant les tâches majeures sont les suivantes : a) . discipliner la pensée, b) cultiver,
c) civiliser, et d) moraliser (p. 16 et suiv.). S’il admet que l’éducation contemporaine satisfait aux
trois premières tâches, il estime et déplore que « nous vivons au temps de la soumission à la
discipline, de la culture, de la civilisation, mais nous sommes encore loin de celui de la rectitude
morale » (p. 17).
C’est à propos de cette quatrième tâche majeure de l’éducation que Kant manifeste
vraiment son originalité, celle qui a été souvent mal comprise en raison d’une application fautive du
concept de morale, mais qui comporte le respect d’une future éthique universelle. Par moralisation,
il faut en effet comprendre que l’individu à éduquer devrait acquérir la disposition d’esprit qui « ne
lui fasse choisir que de bonnes fins ». « Bonnes sont les fins qui reçoivent nécessairement
l’approbation de chacun et qui peuvent être en même temps les fins de chacun » (p. 17). Par
moralisation, il faut donc entendre les démarches éducatives qui tendent à former le « caractère
moral » des enfants et jeunes gens. Or, il existe une relation infrangible entre celui-ci et la notion de
la dignité de l’humanité, et il doit donc être interprété comme anticolonialistes, anti-impérialistes et
élitistes comme « citoyen du monde ». L’éducation doit donc inculquer aux enfants qu’ils ont d’une
part des devoirs envers eux-mêmes et d’autre part, des devoirs envers les autres :
« Le devoir envers soi-même consiste en ce que l’homme respecte la dignité de l’humanité
en se propre personne » (p. 51). Que dans chacun de ses actes, l’enfant ou la personne à éduquer se
souvienne que « l’homme a en lui-même une certaine dignité qui le distingue de toutes les autres
créatures vivantes » et que c’est son devoir de ne point renier cette dignité de l’humanité de sa
propre personne » (p. 50).
S’agissant des devoirs envers les autres : « Il faut de très bonne heure enseigner à l’enfant le
respect et la considération du droit des hommes » (p. 51). Kant enseigne, par exemple, à l’enfant
riche à témoigner à un autre enfant, moins riche que lui, le même respect qu’à ses semblables.
L’espace faisant ici défaut pour poursuivre l’examen des nombreuses réflexions dignes
d’intérêt consacrées par Kant à l’éducation., nous nous contenterons du fait que le principe
6
d’obéissance en éducation est toujours appliqué dans le contexte de la raison. Au stade final de
l’éducation, le devoir, l’obéissance et la raison se conjuguent : « Accomplir un acte par devoir, c’est
obéir à la raison » (p. 46).
A qui s’adresse l’éducation ?
Les propos de Kant se situent à deux niveaux : ceux qui concernent l’homme en général et qui
s’appliquent à tous les âges de l’existence, et ceux qui s’appliquent aux enfants et adolescents,
c’est-à-dire à toute personne n’ayant pas encore atteint l’âge adulte. Quelques indications
concrétiseront chacune de ces deux approches.
L’homme est, de façon générale, doté de toutes les dispositions au bien. « L’homme doit
tout d’abord pourvoir au développement de ses dispositions au bien ; la Providence ne les a point
déposées en lui sous une forme déjà achevée. Se rendre meilleur, se cultiver soi-même et, si sa
nature est mauvaise, faire naître en soi la moralité, tel est le devoir de l’homme » (p. 13). Un
homme « peut être hautement cultivé physiquement et avoir un esprit bien formé, mais ne
témoigner que d’une piètre formation morale, et rester, en fin de compte, une mauvaise créature »
(p. 13 et suiv.).
La véritable nature de l’homme se reflète dans certaines capacités d’esprit et
d’entendement. Kant fournit une définition exemplaire : « L’entendement est connaissance du
général. Le jugement est l’application du général au particulier. La raison est la faculté de voir
La nature de l’enfant apparaît dans maintes observations et, par déduction, dans les conseils
donnés pour l’éducation. Les enfants doivent, par exemple, pouvoir se comporter selon leur âge, et
ne pas être soumis à des exigences excessives, ni insuffisantes. « Un enfant doit se contenter d’une
sagesse d’enfant » (p. 46). La nature essentielle de l’enfant est déformée par la précocité ou par les
souci de la mode . « Les enfants doivent avoir aussi un coeur ouvert et un regard rayonnant à
l’image du soleil » (p. 47). « Dans l’hypothèse où l’enfant présenterait – ce qu’on ne saurait
concevoir que dans des cas d’une rareté extrême – une propension naturelle à l’entêtement, le
meilleur moyen, s’il ne fait rien pour nous être agréable, est de ne rien accomplir en retour pour lui
faire plaisir » (p. 42 et suiv.). « Il ne faut pas davantage inculquer la timidité aux enfants » ((p.
41). « Ils n’ont pas à discuter de tout » (p. 41). « Il est des plus dommageable d’accoutumer
l’enfant à faire un jeu de toute chose » (p. 35).
Comment amener un enfant à acquérir une raison éclairée, éprise de paix et soucieuse de
l’universel ?
Kant juge à cet égard nécessaire le développement de « l’art de l’éducation ou pédagogie »
(p. 14) afin de » la transformer en science » (p. 14). ). Il est, de même, nécessaire que soient
reconnus les vrais problèmes posés par l’éducation et les faux problèmes dénoncés par une critique
d’ordre idéologique. Kant traite, notamment, du problème de la contrainte en éducation , des
méthodes d’apprentissage et du concept de devoir .
S’agissant des contraintes en éducations, la question essentielle est de savoir comment
concilier la soumission aux impératifs imposées par la loi et les impératifs sociaux, sans lesquels il
n’est pas de vie possible, et la capacité « d’user de sa liberté » (p. 20). Si l’enfant ne sent pas de
bonne heure « l’inéluctable résistance de la société », il n’apprendra pas à apprécier la difficulté qu’il
y a à subsister et à conquérir son indépendance personnelle. Kant préconise trois règles de conduite
éducatives en vue de guider progressivement à la liberté :
Il convient, dès la première enfance, de laisser l’enfant libre en toutes choses, hormis celles où il se nuit à lui-même,
pourvu qu’il n’entrave pas par là la liberté des autres. Il faut lui montrer qu’il ne peut arriver à ses fins qu’en laissant
les autres atteindre les leurs. Il faut lui prouver qu’on lui impose une contrainte propre à le mener à l’usage de sa
propre liberté, qu’on veille à sa culture pour qu’il puisse être un jour libre, c’est-à-dire qu’il n’ait pas à dépendre de la
sollicitude d’autrui (p. 20).
7
Dans ce contexte, le problème de la discipline se pose de telle sorte que les règles de la discipline
doivent toujours laisser à l’enfant le sentiment de sa liberté, à condition qu’il n’entrave pas celle des
autres (p. 29). Il faudrait que les enfants prennent l’habitude du travail sans être obligés pour autant
à renoncer au jeu. Pour résumer : « L’éducation doit comporter la contrainte, mais non pour autant
l’esclavage » (p. 35).
En ce qui concerne les méthodes d’apprentissage, Kant rappelle certains principes
fondamentaux : « L’individu assimile et retient le mieux de ce qu’il apprend, pour ainsi dire, de luimême
» (p. 40). « Il importe que les enfants apprennent à penser », et non qu’ils soient dressés
comme des animaux. Or, penser, cela s’apprend par la méthode socratique, de pair avec ce qu’on
appelle la méthode mécanique de la catéchèse. « Dans la formation de la raison, il faut user de la
méthode socratique ». Les enfants, certes, ne peuvent comprendre seuls les fondements essentiels,
« mais il faut bien reconnaître que la perception de la raison ne peut leur être inculquée de force »
(p. 40). La méthode socratique devrait aussi déterminer le cheminement de la méthode mécanique
de la catéchèse, laquelle est « exemplaire » dans l’exposé de la religion révélée et de ses rapports
avec l’histoire.
Dans ses leçons de pédagogie, Kant a formulé encore bien d’autres conseils dignes d’intérêt
en matière de pédagogie pratique. Il s’y tient à mi-chemin entre les positions extrêmes de son
époque, que ce soit, par exemple, dans l’opposition jeu et travail, liberté ou contrainte, etc. Mais il
paraît important de souligner, pour terminer, l’intérêt qu’il attache à l’éducation dans son rôle de
formatrice du caractère et de la conscience. Le devoir, l’action guidée par la conscience, et l’égalité
d’humeur ne sont d’ailleurs pas en contradiction avec la « joie du coeur », qui naît de ce que l’on n’a
rien à se reprocher (p. 59). Kant n’interdit pas l’inclination, l’intérêt et le plaisir. Simplement, il ne
leur accorde qu’une valeur relative, subordonnée, chez l’individu, à l’amour du prochain et au bienêtre
universel
Ce primat du devoir, Kant le promulgue avec l’intention très arrêtée de former des citoyens
du monde. C’est en les situant dans l’effort fait pour promouvoir la paix universelle que l’on
comprendra et appréciera pleinement les phrases suivantes : « Une action doit apparaître valable à
mes yeux non par ce qu’elle correspond à mes propres inclinations, mais parce qu’elle reflète mon
devoir d’amour du prochain et aussi la conscience que j’ai d’être un citoyen du monde. La nature
de notre âme nous demande de nous intéresser : 1. à nous mêmes, 2. aux autres avec qui nous
avons grandi, et 3. à ce qui est le mieux dans le monde. Il faut familiariser les enfants avec cette
façon de voir les choses qui réchauffera leur âme. Ils doivent se réjouir de ce qui est le mieux à
l’échelle de l’univers, même si cela n’est pas à l’avantage de leur patrie ou ne leur apporte aucun
bénéfice » (p. 59).

Les méthodes

Les instruments de la recherche dont dispose la science contemporaine sont nombreux et variés, et
résultent d’une longue évolution historique. Leur diversification selon les domaines de recherche
(nature, intellect. société, etc.), et la façon moderne de les qualifier (« phénoménologique »,
« empirique », « dialectique », etc. ) font qu’il est difficile d’extrapoler et de les appliquer à des
périodes plus anciennes de l’histoire. On nous permettra donc de donner ici quelques précisions
pour tenir compte, autant que possible, des façons de penser propres à l’époque de Kant.
Sans conteste, c’est l’expression « critique transcendantale » qui qualifie le mieux la
méthode d’investigation philosophique de Kant18. Selon ses propres termes, Kant a sorti la
philosophie de son « sommeil dogmatique » en matière de contenus et de méthodes, et élaboré sa
propre méthode de réflexion philosophique qui allait faire de lui l’une des grandes figures de la
philosophie mondiale. Ce qu’il en est résulté pour l’éducation de l’époque, Kant l’a montré dans ses
propos sur la pédagogie, après son changement critique de position et aussi par le contenu
8
« éducatif » de sa philosophie novatrice sur la pédagogie. On pourrait dire, pour plus de brièveté,
que, en établissant une distinction entre les idées et le matériel de la recherche « empirique », Kant a
frayé la voie à l’une des positions fondamentales de la science moderne de l’éducation qui part du
principe de la liberté de ses sujets. Quand même il n’y aurait jamais eu une notion de liberté avant
lui, cette liberté existe depuis Kant en tant qu’idée normative, indépendamment de tous les facteurs
empiriques négatifs et réalités oppressives
Kant, fondateur de l’idéalisme allemand, limite la connaissance scientifique à ce qui est de
son ressort, sans pour autant ignorer les idées « non empiriques » inhérentes à l’existence humaine.
Il cherche au contraire, il cherche à garantir intellectuellement la liberté de la pensée de l’homme,
d’une part en montrant l’indémontrabilité des valeurs suprêmes de l’homme par la science
empirique, car cette preuve impliquerait la négation de la liberté de l’esprit, et d’autre part, en
appelant l’attention « phénoménologico-transcendantal » sur la dignité par laquelle se définit la
condition humaine et qui mérite un commentaire critique.
Outre la critique transcendantale et son application universelle aux domaines non
philosophiques, Kant a utilisé en matière pédagogique, des méthodes d’investigation traditionnelles
telles que l’observation, l’étude de la littérature spécialisée, et l’examen des opinions de
contemporains éclairés auxquels il se réfère explicitement (Basedow, Rousseau). Quant aux
méthodes pédagogiques de Kant dans le cadre de l’enseignement universitaire de l’époque, elles
firent de lui un maître et un conseiller recherché de ses étudiants.
Influence de l’oeuvre de Kant
Notre sujet, qui est celui de « Kant, éducateur », nous oblige à limiter ici la description de son
influence à certains domaines de la théorie et de la pratique pédagogique. On peut les classer en
diverses catégories - éducation de base , éducation familiale, éducation scolaire, éducation
universitaire, éducation générale des adultes et éducation des personnes plus âgées - dans le
contexte de l’histoire de l’Allemagne et de l’Europe.
L’influence de Kant en matière pédagogique est naturellement liée à celle qu’il a exercée
comme fondateur de l’idéalisme allemand (dans l’histoire de la philosophie), comme figure de
proue du siècle des Lumières en Prusse au XVIIIe siècle (dans l’histoire des sciences morales), et
comme intellectuel européen de dimension mondiale (dans l’histoire de la culture et de l’éducation).
Sans poser ici la question de savoir lesquels de ses contemporains, quelles époques historiques ou
quels siècles (entre le XVIIIe et le XXe) l’ont bien compris, on peut considérer son influence sous
deux angles et étudier tout d’abord ce qu’il a apporté de positif et, en second lieu, ce que son
oeuvre comporte négatif.
Comme il n’existe pas de bilan empirique global pour chacun des domaines théoriques et
pratiques évoqués précédemment, nous nous en tiendrons à quelques termes de référence tels que
les Lumières , l’individu, l’éthique du devoir et la paix universelle.
Du point de vue de l’histoire de l’éducation, Kant est reconnu comme le représentant du
siècle des Lumières, et il est effectivement cité dans tous les manuels allemands comme la source de
l’esprit des Lumières conçu au sens international. Sa réponse à la question de la signification des
Lumières à savoir que tout individu doit trouver le courage de se servir de son propre entendement
en dépit des obstacles opposés par la lâcheté et la paresse, reste encore valable pour l’Allemagne
réunifiée d’aujourd’hui.
La notion d’individu a été différemment comprise au sens philosophique, juridique et
théologique. Mais depuis Kant, ce terme exprime, à tous les niveaux de culture générale en
Allemagne, l’idée que tout être humain est une fin en soi », c’est-à-dire indépendamment de sa
classe sociale, de ses idées, de sa religion, de sa race, de sa nationalité, etc., et indépendamment de
tous les obstacles présents sur son chemin, tout homme est, dès le début de son existence, un être
ayant une dignité et des droits intrinsèques. Kant est cité, avec Rousseau, Shaftesbury et Leibniz,
9
comme l’une des sources de l’idée qui a inspiré l’enseignement européen depuis des siècles et qui
veut qu’il faille « laisser se développer librement les forces et dispositions qui sommeillent en
l’homme, en considérant l’homme non comme un moyen mais comme une fin en soi, comme un
être en qui il faut faire confiance et auquel il faut laisser exprimer sa spontanéité »19.
L’éthique du devoir telle que la conçoit Kant est un objet de controverse entre les
philosophes. Mais dans ce contexte des écrits pédagogiques, lorsqu’il utilise, par exemple, l’idée de
devoir envers nos semblables et pose en principe qu’il faut apprendre à l’individu à résister au
consumérisme égoïste et à l’isolement, l’importance d’une éducation globale s’impose
particulièrement. L’impératif catégorique, qui veut que tous les hommes soient obligés d’agir de
telle façon que les principes de leurs actions s’imposent à tous, fait implicitement et explicitement
référence à une humanité à l’échelle du monde entier et dans laquelle tous sont égaux. Les
commentateurs de l’idée de devoir chez Kant notent avec étonnement les avatars l’éthique du
devoir, après la mort du philosophe, au XIXe et au XXe siècle. Plus récemment la véritable nature
de la pensée a été reconstituée, et l’on prend de plus clairement conscience des dérives incroyables
que nationalisme et formalisme lui ont fait subir.
C’est à une réinterprétation positive de l’idée kantienne du devoir dans une perspective
pédagogique qu’a procédé, entre autres, Eduard Spranger, éminent pédagogue de l’époque de
Weimar et de la première période (1949 à 1959) de la création de la République fédérale20, en
faisant apprécier, dès Frédéric II, une tradition prussienne digne de considération. Ce dernier, avait
fait ce qui, pour son époque, était de son devoir, et attendait de ses successeurs qu’ils en fassent
autant. Spranger ne pense pas qu’il soit possible d’engager pédagogiquement la lutte pour le bien
de l’humanité tout entière, contre l’égoïsme, les convoitises de tous genres et les autres facteurs
négatifs, sans recourir à l’idée de devoir, qu’il oppose même à Humboldt « qui ne cherche qu’à
donner libre cours à ses dispositions les plus profondes »21
De même, Kant a été positivement apprécié dans le domaine théorique et pratique de
l’éducation pour la paix, qui a pu s’inspirer de son Projet de « paix perpétuelle »22. Kant s’y oppose
à ceux qui « encensent le pouvoir dominant »23. Il y conçoit un accord futur entre la politique, le
droit et la morale génératrice de paix. « Il faut respecter saintement le droit de l’homme, dussent les
souverains y faire les plus grands sacrifices »24. C’est « devoir, s’il y a là un espoir fondé de
réalisation », que d’oeuvrer à ce que « la paix perpétuelle qui succédera aux trêves jusqu’ici
nommées traités de paix ne soit pas une chimère, mais un problème dont le temps,
vraisemblablement abrégé par l’uniformité des progrès de l’esprit humain, nous promet la
solution »25.
Pour ce qui est de la théorie pédagogique, l’influence de Kant a continué de se manifester
de multiples façons aux XIXe et XXe siècles. Il n’y eut guère de « classique de la pédagogie » qui se
fût dispensé de citer Kant. Qui plus est, on a vu se manifester une école de l’orientation scientifique
se référant directement à Kant et dénommée école « phiosophique transcendantale néo-kantienne »,
qui a fait des fondements idéalistes de la philosophie kantienne la base de toute réflexion
pédagogique. Ce courant pédagogique a constitué, en s’appuyant sur les concepts de sujet, de moi,
de conscience, de dialogue, etc., ce qu’on a appelé la dimension normative de l’éducation, qui
cherche à garantir partout et en tout temps la dignité de l’homme. Alfred Petzelt et ses élèves ont
été, après la seconde Guerre mondiale, les représentants éminents de cette école26.
C’est lorsqu’il est question du militarisme prussien, de conceptions du devoir hostiles à la
vie telles qu’elles ont pu se manifester au cours de l’histoire allemande, ou des perversions
intellectuelles du national-socialisme, que le nom et l’oeuvre de Kant sont cités avec une
connotation négative. Nous en prendrons pour exemple le jugement formulé par Hans Scholl,
étudiant exécuté pour résistance à l’hitlérisme. Il proteste, le 22 mai 1942, contre l’image, évoquée
plus haut, que donne Spranger du roi de Prusse Frédéric II : « Faut-il qu’un peuple soit petit pour
qualifier de grand Frédéric II ! Ce peuple s’est battu pour sa liberté contre Napoléon, mais il a
choisi la servitude prussienne »27. Par son interprétation de Kant, Hans Scholl se situe dans la lignée
10
de son maître spirituel, Theodor Haecker, qui avait écrit : « Faire des phrases sur le devoir, c’est
véritablement déshumaniser l’homme. Mais c’est une invention et une spécialité germanoprussiennes
»28. Haecker qualifie l’idéalisme allemand de Kant d’« affaire prussienne »26. C’est dans
le même sens que s’exprime Hans Scholl dans sa lettre à Rose Nägele, datée du 25 janvier 1942 à
Munich : « Quel mal Kant n’a-t-il pas fait avec son impératif catégorique ! Kant, dureté,
prussianisme, c’est la mort de toute vie de l’esprit ! »29
Les acquis durables de Kant
Quelles qu’aient pu être l’influence de Kant, au sens étroit ou au sens large, au fil de l’histoire, et les
différentes images, parfois contradictoires, données de son oeuvre, nous allons conclure en tentant
d’esquisser ce que cette oeuvre signifie pour nous et de monter sur quelques points, sous forme en
quelque sorte idéogrammatique, sans faire de mythologie et en toute honnêteté, ce qu’il faut
considérer comme sa contribution, sur le plan philosophico-pédagogique, à l’édification spirituelle
et normative d’une future société universelle. Quatre thèmes peuvent servir de point de départ pour
une réflexion plus approfondie.

L’EUROPE AU SIÉCLE DES LUMIÈRES

Prenant une part décisive à ce mouvement, Kant a su donner une expression frappante et définitive
à ses arguments contre l’intolérance, l’endoctrinement, la lâcheté et la paresse, de sorte qu’ils
peuvent nous servir encore aujourd’hui pour édifier une société universelle sur de bonnes assises.
Souvenons-nous de sa définition des Lumières : « Les Lumières se définissent comme la sortie de
l’homme hors de l’état de minorité où il se maintient par sa propre faute. La minorité est
l’incapacité de se servir de son propre entendement sans être dirigé par un autre. Elle est due à
notre propre faute quand elle résulte non pas d’un manque d’entendement mais d’un manque de
résolution et de courage pour s’en servir sans être dirigé par un autre. Sapere aude ! Aie le courage
de te servir de ton propre entendement ! Voilà la devise des Lumières »30.
Depuis cette définition, la notion de « Lumières » a évolué au cours des différentes phases
de l’histoire de la culture. On a pu parler d’une deuxième, d’une troisième et d’une quatrième
époque des Lumières dans l’histoire européenne des idées. Il apparaît aujourd’hui qu’un retour à
Kant et, à partir de sa conception des Lumières, une reconstitution de ce concept « évolutif » est
une tâche qui s’impose aux intellectuels, notamment dans la situation résultant du remodelage de
l’Europe depuis 1989.
Les tâches majeures de l’éducation telles que Kant les conçoit , c’est-à-dire sous une
quadruple forme (discipliner, cultiver, civiliser et moraliser), il convient de les réinterprétées
aujourd’hui, après les nombreuses erreurs de la pédagogie allemande, en revenant à leur sens
originel. Kant ne voulait pas que l’éducation soit opposée à la croyance religieuse. Et il n’appuyait
pas non plus implicitement le principe inhumain d’obéissance qui est une constante de l’histoire
prussienne. Bien au contraire, il cherchait à exprimer le fait que toutes les activités éducatives et
formatrices devaient être régies en vertu d’un principe excessif d’exigence ou d’indulgence, en
respectant et en appliquant, dans toute la mesure du possible, l’axiome de la dignité de l’être
humain. Telle devrait être la démarche permettant de redéfinir et de consolider, en termes adaptés à
notre époque, cette exigence de « moralisation » que nous a léguée la pensée kantienne.

LE CONCEPT DE L’INDIVIDU

Que tout homme, partout dans le monde et en tout temps, constitue une individualité existentielle
élémentaire à considérer comme fin en soi, voilà qui est devenu depuis Kant et grâce à lui une idée
que l’on ne peut ignorer et dont il est admis qu’elle doit guider la conduite des hommes.
11
L’intérêt que revêt l’idée kantienne de la personne humaine pour la pédagogie s’impose à
l’évidence, si l’on considère les analyses qui en ont été faites dans les sciences voisines. En
philosophie du droit, par exemple, il est entendu que : « Par sa doctrine de l’autonomie morale de
l’homme, Kant a ouvert une voie tout à fait nouvelle. Il substitue au problème de la moralité posé
en termes factuels et objectifs, tel qu’il avait préoccupé toute la doctrine du droit naturel avant lui,
le problème de la moralité subjective. L’autonomie morale de l’homme devient le principe de la
moralité. La personne morale – c’est-à-dire non pas l’homme empirique, élément du monde
sensible, mais « l’humanité présente en l’homme » – est fin en soi, et non moyen en vue de fins
étrangères. Et pour ce qui est du « comment » de la démarche morale, Kant le définit par son
célèbre impératif catégorique : « Agis uniquement d’après la maxime qui fait que tu puisses vouloir
en même temps qu’elle devienne une loi universelle »31.
Maintes objections ont été faites à cette argumentation de Kant, qui a pourtant très
largement contribué à la justification philosophique des droits de l’homme. On lui a notamment
reproché de tourner en rond lorsqu’il déduit le « quoi », c’est-à-dire le contenu éthique, du
« comment », à savoir l’impératif catégorique. Mais ce reproche serait injustifié, car fondé sur l’idée
erronée que le « quoi » pourrait être défini sans référence subjective, sans le « comment » « Mais il
est vrai que le « quoi » ne peut être entièrement défini par le « comment », comme l’admet
cependant le fonctionnalisme moderne (N. Luhmann) »32. Il importe de rappeler ici les
conséquences du concept de personne humaine : « Agis de telle sorte que tu traites l’humanité aussi
bien dans ta personne que dans la personne de tout autre, toujours comme une fin, et jamais
simplement comme un moyen »33.

AU SERVICE DE LA PAIX

Le devoir de paix tel qu’il se présente aujourd’hui, absolu et d’application universelle, s’imposant à
tous les hommes de tous les continents et de tous les temps, on peut à bon droit en situer le
fondement historique dans le théorème kantien de l’impératif catégorique, et notamment dans ses
incidences sur les activités qui tendent à faire de la dignité humaine une réalité sans réserves, avec
pour fin l’établissement de la paix éternelle. Kant lui-même s’en est expliqué clairement dans ses
leçons de pédagogie.
L’importance de la théorie de l’impératif catégorique comme base de réflexion dans la
problématique actuelle de la paix et en vue d’une coexistence pacifique de tous les peuples et de
toutes les cultures (sans les connotations négatives des penseurs allemands), d’autres cheminements
la font également apparaître : l’impératif catégorique s’impose toujours dès qu’il s’agit de définir
une norme éthique fondamentale d’application universelle. C’est ce qu’a bien vu P. Mikat lorsqu’il
s’est préoccupé de définir les facteurs stabilisateurs du mariage dans le monde moderne. Reprenant
les différents éléments du débat scientifique, il rappelle la valeur qui fonde essentiellement l’éthique
moderne de la liberté en responsabilité : la dignité de l’être humain comme sujet moral, comme
personne, la dignité intangible de celui qui, en réglant sa propre conduite, a le pouvoir d’édicter les
lois devant présider universellement à la coexistence d’êtres humains34. « En effet, et bien que
l’homme agisse comme un être de chair et d’os, il n’est pourtant pas un instrument de l’arbitraire
mais, confié – en liberté et en raison – à sa propre responsabilité, il est à lui-même sa propre fin.
Tout être raisonnable, capable de définir des fins, se distingue donc, en dernier ressort, par son
propre caractère de fin en soi et de volonté autonome, et c’est là ce qui constitue le sens de son être
moral »35.
L’impératif catégorique et la reconnaissance de la dignité de la personne, quels que soient
l’homme et son champ d’activité, peuvent être considérés comme les deux faces d’une même
médaille. L’impératif catégorique rappelle que la dignité de la personne humaine est la notion qui
doit guider généralement l’action humaine. C’est la notion de la « dignité fondamentale de toutes
les données naturelles qui portent et environnent l’être humain, comme de toutes les productions
12
normatives transmises par voie socio-culturelle ». C’est ce qui permet à Kant de formuler, dans la
célèbre seconde version de l’impératif catégorique, le principe fondamental de la conduite de
l’homme, en tant que personne morale, à l’égard de lui-même et des autres hommes : « Agis de
telle sorte que tu traites l’humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre
toujours en même temps comme une fin et jamais simplement comme un moyen ».
Cette idée que tout homme constitue une fin en soi, liée pour nous au nom de Kant, revêt
lorsqu’elle est située par certains commentateurs dans une perspective d’avenir (voir, par exemple,
Reiner ou Bärthlein) une grande importance pour ce qui concerne la solidarité de la communauté
humaine. Elle répond à des besoins anthropologiques essentiels et ouvre la voie à la coopération
de cultures différentes. « Le droit que revendique tout être raisonnable comporte la reconnaissance
du même droit pour tout autre être raisonnable, si l’on admet que tous puissent exister
simultanément et côte à côte en cette qualité ». C’est là le principe de réciprocité qui est posé. « Ce
dernier a déjà, sous forme de « règle d’or », profondément marqué, de façon ou d’autre, la
conscience morale de tous les peuples », et il se trouve formulé en termes positifs dans le Nouveau
Testament : « Ainsi, tout ce que vous désirez que les autres fassent pour vous, faites-le vousmêmes
pour eux » (Mathieu 7, 12).
Le précepte de portée universelle ainsi exprimé dans l’ouvrage fondamental du
christianisme, en accord avec les autres grandes religions, peut être formulé à peu près comme ceci
dans le langage de la philosophie européenne : « La nature de l’être humain, que la liberté et la
raison constituent en sujet moral, oblige par là même à reconnaître tout homme comme objet
moral, comme un individu ». Quiconque s’efforcera de mettre en pratique l’impératif catégorique
et sa conception de la personne ne manquera pas d’aborder les problèmes interhumains et
internationaux sous l’angle des droits légitimes des différentes parties concernées. « Dans le
domaine des relations morales entre les personnes, il s’établira entre celles-ci un équilibre, dès lors
que tout en poursuivant la réalisation de ses prétentions, l’individu ne fera jamais de la personne
d’autrui un simple moyen, mais au contraire la respectera toujours comme porteuse de sens et
animée de prétentions propres, différentes des siennes mais également légitimes. Ainsi la règle
éthique fondamentale devra-t-elle toujours être appliquée comme critère suprême, et elle pourra, en
outre, être utilisée aussi comme principe heuristique dès lors qu’il s’agira, dans le cas concret, de
diriger l’action de l’être humain vers un résultat conforme à sa nature spirituelle ».
Les considérations qui précèdent ne sont pas de pure théorie, comme on peut le voir dans
l’éloge de l’impératif catégorique qu’a prononcé le professeur Kurt Huber devant le Tribunal du
peuple, le 19 avril 1943, avant d’être exécuté par les nazis : « Je m’étais fixé pour but de susciter
dans les milieux étudiants, non pas au moyen d’une organisation mais par le seul verbe, non quelque
acte de violence mais une prise de conscience morale des maux graves qui marquent actuellement
notre vie politique. Le retour à des principes moraux clairs, à l’État fondé sur le droit, à la confiance
d’homme à homme, cela n’est pas illégal mais c’est, au contraire, rétablir la légalité. Je me suis
demandé, dans l’esprit de l’impératif catégorique de Kant, ce qu’il adviendrait si cette maxime
subjective de mon action devenait loi universelle. A cette question, il ne peut y avoir qu’une seule
réponse : ce serait alors le retour, dans notre vie politique, de l’ordre, de la sécurité, de la confiance
en notre État ».
L’UNESCO prépare actuellement une Déclaration universelle sur la tolérance, en guise de
contribution à l’Année des Nations Unies pour la tolérance (1995). Une première étape a consisté à
rédiger un plaidoyer en faveur de ce projet. Celui-ci, dans son point 2, appelle toute institution
scientifique disposant de spécialistes des questions éthiques et religieuses « à rassembler ses forces
créatives afin de les consacrer, unies à celles d’experts d’autres institutions religieuses et éthiques, à
l’élaboration de cette éthique mondiale »41. Il serait difficilement concevable que, dans cette
entreprise, on ignore ces fondements historiques et théoriques que constituent la personnalité et
l’oeuvre de Kant.

Notes
1. Heinrich Kanz (Allemagne). Titulaire d’un doctorat en théologie. A travailllé comme professeur dans
l’enseignement secondaire et comme formateur de professeurs jusqu’à sa nomination, en 1972 comme
doyen de l’École supérieure des sciences de l’éducation à . Il est nommé professeur en 1977 à l’École
supérieure d’éducation à Bonn, et en 1980, professeur d’enseignement général à l’Université rhénane
Friedrich-Wilhelm, à Bonn. Ses principales publications sont les suivantes : Der Nationalsozialsmus als
pädagogisches Probel, Deutsche Erziehungsgeschichte 1933-1945 [Le national-socialisme en tant que
problème pédagogique : histoire de l’éducation allemande, 1933-1945],(1984) ; Deutsche
Erziehungsgeschichte 1945-1985 in Quellen und Dokumenten [Histoire de l’éducation en Allemagne, 1945-
1985, dans les sources et les documents] (1987); Bundesrepublikanische Bildungsgeschichte 1949-1989.
Quellen und Dokumente zum zweiten und dritten Lebensabschnitt [L’histoire de l’éducation en République
fédérale d’Allemagne, 1949-1989 : sources et documents de la seconde et troisième phases] (1989).
2. Scheuerl, Hans (dir. publ.) : Klassiker der Pädagogik [Classiques de la pédagogie], vol. I, Beck, Munich,
1979, p. 11.
3. Bollnow, Otto Friedrich : « Kant und die Pädagogik » (Kant et la pédagogie), dans Westermanns
pädagogische Beiträge [Contributions de Westermann à la pédagogie], vol. 6, 1954, no 2, p. 49-55.
4. Voir par exemple Ritter, Joachim et al. (dir. publ.) : Historisches Wörterbuch der Philosophie [Dictionnaire
historique de la philosophie], Stuttgart /Bâle, Schwabe, 1976, vol. 4, p. 1268-1272. (Nouvelle édition
entièrement révisée de Rudolf Eisler, Wörterbuch der philosophischen Begriffe.)
5. Que l’on pourra étudier, par exemple, dans les ouvrages suivants de la Wissenschaftliche Buchgesellschaft.
Tout d’abord : I. Kant, Werke in zehn Bänden, [OEuvres en dix volumes] [OEuvres en dix volumes] (Wilhelm
Weischedel, dir. Publ.) édition spéciale 1983, en particulier vol. 9 et 10, Schriften zur Anthropologie,
Geschichtsphilosophie, Politik und Pädagogik [Écrits sur l’anthropologie, La philosophie historique, La
politique et l’éducation]. En second lieu, I. Kant, Werke in sechs Bänden [OEuvres en six volumes] (Wilhelm
Weischedel, dir. Publ.), réimpression 1983. Voir, en particulier, vol. 6, Schriften zur Anthropologie,
Geschichtsphilosophie, Politik und Pädagogik [Écrits sur l’anthropologie, La philosophie historique, La
politique et l’éducation]. Signalons, enfin, les éditions fondamentales de l’Académie ; I. Kant, Gesammelte
Schriften (oeuvres complètes), (sous la direction de Preussische Akademie der Wissenschaften, vol 1-22 ; de
Deutsche Akademie zur Berlin, vol. 23 ; et de l’ Akademie der Wissenschaften zu Göttingen, vol. 24 et
suiv.). Tirés à part et réimpressions en 1992, Berlin et New York,, De Gruytr.
6. L’édition suivante marque une étape essentielle dans la recherche kantienne du point de vue des sciences de
l’éducation : I. Kant, Ausgewählte Schriften zur Pädagogik und ihrer Begründung [Morceaux choisis relatifs
à la pédagogie et à ses fondements], Hans Hermann Groothoff et Edgar Reimers (dir. publ.), Schöningh,
Paderborn, 1963.
7. On trouvera une étude biographique complète dans l’ouvrage fondamental de Gross, Felix (dir. publ.) :
Immanuel Kant. Sein Leben in Darstellungen von Zeitgenossen. [Immanuel Kant, sa vie d’après les
témoignages de ses contemporains],avec des bibliographies de L. E. Borowski, R. B. Jachmann und A. Ch.
Wasianski, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, 1980. (Réimpression de l’édition de 1912). Voir aussi
Ausgewählte Schriften zur Pädagogik und ihrer Begründung p. 175-191.
8. I. Kant, Immanuel, Kritik der reinenVernunft [Critique de la raison pure], 1781, 2e éd. améliorée, Karl
Kehrbach (dir. publ.), Leipzig, Philipp Reclam, 1878, p. 626 (II. Méthodologie transcendentale. Deuxième
chapitre, troisième section, « Des opinions, des connaissances et des croyances ». Après la réunification de
l’Allemagne, il semble maintenant approprié de se référer à des éditions unifiées présentant un intérêt
historique ; c’est pourquoi, les éditions Reclam des oeuvres de Kant seront désormais utilisées.
9. I. Kant, Kritik der reinen Vernunft [Critique de la raison pure], op. cit., p. 26
10. I. Kant, Kritik der praktischen Vernunft [Critique de la raison pratique], p. 627, 1788.
11. I. Kant, Kritik der praktischen Vernunft [Critique de la raison pratique], Leipzig, Philipp Reclam, 1978, p.
193.
12. I. Kant, « Aufsätze das Philanthropin » [Essais sur les philanthropes], entre 1776 et 1777, dans Ausgewählte
Schriften zur Pädagogik und ihrer Begründung , op. cit., p. 69.
13. I. Kant, « Nachricht von der Einrichtung seiner Vorlesungen in dem Winterhalbenjahre 1765-66 [Annonce
sur le programme de ses leçons pour le semestre d’hiver 1765-1766], dans dans Ausgewählte Schriften zur
Pädagogik und ihrer Begründung , op. cit., p. 69.
14. I. Kant, « Vorlesung über Pädagogik » [Cours sur la pédagogie], Ausgewählte Schriften zur Pädagogik und
ihrer Begründung , p. 69.
15. I. Kant, « Idee zu einer allgemeinen Geschichte in weltbürgerlicher Absicht »[Idée d’une histoire
générale pour un citoyen du monde, ], Berlinische Monatschrift, 1784 ; « Mutmasslicher anfang der
14
Menschheitsgeschichte [Conjectures sur le commencement de l’histoire humaine], Berlinische
Monatschrift, 1786 ; « Was ist Erklärung ? » [Qu’est-ce que les Lumières ? ], Berlinische
Monatschrift, 1784 ; Zum ewingen Frieden [Paix perpétuelle, 1795 ; Anthropologie in pragmatischer
Hinsicht abgefasst [L’anthropologie d’un point de vue pragmagtique], 1798.
16. I. Kant , Die religion innerhalb der Grenzen der blossen Vermunft [La religion dans les limites de la
seule raison]. (Textes de l’édition de 1793 augmenté des changements figurant dans l’édition de 1794.)
Ausgabe Karl Kehrbach, p. 46, Leipzig, Reclam, 1879.
17. Textes tirés du cours sur la pédagogie (Kant, Ausgewählte Schriften zur Pädagogik und ihrer
Begründung). Les chiffres entre parenthèses renvoient aux pages de cette édition.
18.. J. Ritter, op. cit.
19. Dolch, Josef : Lehrplan des Abendlandes. Zweieinhalbjahrtausende seiner Geschichte [Le plan d’étude de
l’Occident. Deux mille cinq cents ans d’histoire], Henn, Ratingen, 1965, p. 337.
20. Voir également Heinrich Kanz : Bundesrepublikanische Bildungsgeschichte 1949 – 1989 [Histoire de la
formation en République fédérale d’Allemagne de 1949-1989], Francfort/Main, Lang 1989. Voir aussi du
même auteur : Deutsche Erziehungsgeschichte 1945-1985 [Histoire de l’éducation en Allemagne de 1945-
1985], même éditeur, 1987.
21. Henning, Uwe : Eduard Spranger und Berlin – Tradition oder Erbe ? [Eduard Spranger et Berlin –
Tradition ou patrimoine ?], Bibliothèque de l’Université libre de Berlin, 1992, p. 5.
22. Voir H. Röhrs, Frieden – eine pädagogische Aufgabe. Idee und Realität der Friedenspädagogik [La
paix : une tâche pédagogique. Idées et réalités de l’éducation pour la paix], Agentur Pedersen
Westermann, Braunschweig, 1983.
23. I. Kant, Zum ewigen Frieden : ein philosophischer Entwurf [sur la paix perpétuelle : essai philosophique],
Königsberg, Nicolovius, 1795, p. 75.
24. Ibid. p. 91.
25. Ibid. p. 104.
26. Comme on peut le voir notamment à la fin de l’article d’A. Petzelt sur « Kant : Das Fürwahrhalten lässt sich
nicht mitteilen » [Kant : Vous ne pouvez pas communiquer ce que vous croyez], dans Einführung in die
pädagogische Fragestellung. Aufsätze zur Theorie der Bildung [Introduction à l’interrogation
pédagogique : essai sur la théorie de l’éducation], 2e partie (sous la direction de Wolfgang Fischer),
Fribourg, Lambertus-Verlag, 1963, p. 9-61. Sur le concept de dignité dans la philosophie de l’éducation
actuelle en Allemagne, voir Heinrich Kanz : Einführung in die Erziehungsphilosophie [Introduction à la
philosophie de l’éducation], Francfort/Main, Lang, 1987, p. 100.
27. Scholl Hans et Scholl Sophie, Briefe und Aufzeichnungen [Lettres et notes], (sous la direction d’Inge Jens, ),
Francfort/Main, Fischer, 1984, p. 100.
28. Ibid. p. 266.
29. Ibid. p. 77.
30. I. Kanz « Was ist kertlärung ? « op. cit.29
31. Kaufmann, Arthur, Rechtsphilosophie [La philosophie du droit], dans Staatslexikon echt, Wirtschaft,
Gesellschaft [Dictionnaire du droit de l’économie et de la société],. (publié par Görres-Gesellschaft), 7e éd.
entièrement revue, Fribourg-en-Brisgau, Herder, 1988, vol. 4. P. 711.
32 Ibid
33 I. Kant, Grundlegung der Metaphysik der Sitten [Fondements de la métaphysique des moeurs] , 2e éd. Riga,
Hartkoch, 1786. (Stuttgart, Reclam, 1952, p. 81).
34. Mikat, Paul, Ethische Strukturen der Ehe in unserer Zeit [Structures éthiques du mariage à notre époque],
Schöningh, Paderborn, 1987, p. 35 et suivantes.
35. Ibid. p. 35.
36. I. Kant, Grundlegung der Metaphysik des Sitten, op. cit. p. 81.
37. P. Mikat, op. cit. p. 36 et suivantes
38. Ibid.
39 Ibid..
40. Dans Die weisse Rose. Ausstellung über den Widerstand von Studenten gegen Hitler in München 1942-
1943. (La rose blanche. Exposition sur la résistance des étudiants à Hitler, Munich 1942-1943). p. 63.
Organisé par la Weissen Rose Stiftung, Genterstrasse 13, 8000 München 40, sans indication d’année.
41. UNESCO heute [L’UNESCO aujourd’hui], Bonn, vol. 39. No 1, 1992, p. 17.
15

OEuvres d’Immanuel Kant

1781. Kritik der reinen Vernunft. 2e éd., 1787. (Critique de la raison pure, 1950)
1783. Prolegomena zur einer jeden künftigen Metaphysik die als Wissenschaft wird auftreten können.
(Prolégomènes à toute métaphysique future qui voudra se présenter comme science, 1951.)
1785. Grundlegen zur Metaphysik der Sitten (Fondements sur la métaphysique des moeurs, 1969.)
1788. Kritik der praktischen Vernunft. (Critique de la raison pratique, 1949)
1790. Kritik der Urteilskraft. 2e éd. 1793 (Critique du jugement, 1892, 2e éd. 1914)
1793. Die Religion innerhalb der Grenzen der blossen Vernunft. . 2e éd. 1976. (La religion dans les limites de la
seule raison, 1960)
1795. Zum ewigen Frieden. 2e éd. 1796. (Paix perpétuelle, 1915, réimpression 1972.)
1797. Die Met
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