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 DU BREVET AU BAC :: LECTURES ANALYTIQUES ET COMMENTAIRES :: l'heptaméron, Catherine de Navarre, 2 documents

l'heptaméron, Catherine de Navarre, 2 documents

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Prépabac, examen2017
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MessageSujet: l'heptaméron, Catherine de Navarre, 2 documents  Posté leVen Fév 04, 2011 6:07 pm Répondre en citant




Auteur Marguerite de Navarre
Genre Nouvelle
Pays d'origine France
Lieu de parution Paris
Date de parution 1558


Présentation de l'heptaméron, Catherine de Navarre




Avant propos :

L’Heptaméron est un recueil inachevé de 72 nouvelles écrites par Marguerite de Navarre. L'ouvrage tire son titre du fait que le récit se déroule sur sept journées, la huitième étant incomplète.

L'œuvre de Marguerite de Navarre pose d’emblée des questions : la première concerne la date de sa composition. Œuvre de jeunesse commencée en 1516 ou œuvre tardive qui serait postérieure à 1545 ? Les réponses selon les critiques divergent considérablement. Nicole Cazauran montre l’enjeu qui en découle : « On aimerait plus encore savoir si cette œuvre complexe résulte d’une lente élaboration et de multiples reprises au cours de toute une vie, ou si elle fut composée en peu d’années, avec une claire conscience du dessin de l’ensemble »[1].

Ainsi, la datation de l’Heptaméron est difficile à établir. Bien qu’il existe des traductions du Décaméron de Boccace (qui est le modèle italien pour le texte de Marguerite) en français dès le quinzième siècle, Lucien Febvre insiste sur le fait que c'est la traduction d`Antoine Le Maçon de 1540-1542 qui a inspiré Marguerite de Navarre[2]. Les références à des événements réels dans plusieurs des nouvelles nous permettent de préciser leurs dates de rédaction. Par exemple, la soixante-sixième nouvelle, racontée par Ennasuite, met en scène le mariage de la fille de Marguerite, Jeanne d’Albret, et Antoine de Bourbon, qui se marièrent en 1548. Dans la soixante-septième nouvelle, l’expédition au Canada racontée par Simontaut a un fondement vérifié – l’expédition du capitaine La Roque de Roberval en 1542[3]. Ces deux exemples indiquent que Marguerite de Navarre travaillait sur son livre dans les dernières années de sa vie.

Ensuite l’absence de manuscrit autographe et d’édition publiée du vivant de l’auteur rend particulièrement difficile l’établissement précis d’un texte. Doit-on parler d’un Heptaméron des nouvelles comme le propose Claude Gruget, son second éditeur (1559), ou bien se fier aux paroles de Parlamente dans le Prologue, où elle rappelle les Cent nouvelles de Boccace et propose à la compagnie d’atteindre en dix jours la centaine. Les deux premières éditions de Pierre Boaistuau (1558) et Claude Gruget (1559) sont peu fiables : ajouts, réorganisation, censure de propos jugés trop hardis. Comment est-il possible, dans ce contexte difficile, de se risquer à un examen minutieux de la version originale ? Un autre débat épineux est celui qu’inspire l’apparition de l’œuvre. En 1559, Jeanne d’Albret, fille de Marguerite, vient à Paris et voit le succès de l’œuvre de sa mère. La préface de Boaistuau parle du recueil comme ouvrage anonyme. Dans la préface, qui est dédiée à Marguerite de Bourbon, son éditeur écrit qu’il avait corrigé le manuscrit. Jeanne est furieuse et embauche tout de suite Claude Gruget pour faire une édition authentique[4]. Les liens entre les branches des familles royales et la réception de l’œuvre compliquent ainsi une histoire déjà fort difficile à saisir.

Décaméron et Heptaméron

En ce qui concerne les sources, enfin, les questions restent ouvertes. Les notes de Le Roux de Lincy, souvent reproduites dans les éditions modernes, ont souvent induit les lecteurs en erreur : le modèle des dix journées du Décaméron de Boccace a été remis en question par Pierre Jourda[5]. Marguerite s’inspire autant sinon plus des Cent Nouvelles nouvelles que du Décaméron et le seul conte où l’emprunt est visible concerne une retranscription de la Châtelaine de Vergy (nouvelle 70).

En revanche, comme dans l’ouvrage de Boccace, les nouvelles s’inscrivent dans un cadre. Dix voyageurs sont réunis dans une abbaye de Cauterets, alors qu’un violent orage a coupé toute communication. Avant de quitter l’abbaye il faut attendre qu’un pont soit construit, c’est-à-dire dix ou douze jours (L’Heptaméron - Prologue). En cela, le recueil de Marguerite se rapproche des modèles de Boccace et de Philippe de Vigneulles. Puisque la reine mourut avant d’achever son œuvre, le nombre de jours est réduit à sept, ce qui rappelle les sept jours de création dans la mythologie judéo-chrétienne. D’un modèle laïque l’on serait passé à un modèle chrétien, voire évangéliste. De la même façon, Marguerite mêle aux histoires profanes des leçons tirées de l’évangélisme français. Notamment, Oisille, dans le Prologue, conseille la lecture de la Bible comme un exercice qui empêcherait « l’ennui » de la compagnie :

« Mes enfans, vous me demandez une chose que je trouve fort difficile, de vous enseigner un passe temps qui vous puisse delivrer de vos ennuyctz; car, aiant chergé le remede toute ma vye, n'en ay jamais trouvé que ung, qui est la lecture des sainctes lettres en laquelle se trouve la vraie et parfaicte joie de l'esprit, dont procede le repos et la santé du corps. » (L’Heptaméron - Prologue)

Les participants de ces journées commenceront donc chaque jour en écoutant une leçon spirituelle d’Oisille. La forme même du recueil est ainsi décidée par trois des devisants, ce qui relève d’une égalité unique chez les personnages : « La règle du jeu implique l’oubli des hiérarchies et l’affrontement des rivaux à armes égales »[6]. Pour passer le temps, cette société écoute des histoires dans des registres divers. La réussite de cet ouvrage tient au fait qu’il privilégie aussi la conversation, car chaque nouvelle est suivie des commentaires tenus par l’ensemble des auditeurs.

Les devisants

Parmi les dix devisants qui racontent les nouvelles, se trouvent cinq femmes : Parlamente, Oisille, Longarine, Ennasuite et Nomerfide, et cinq hommes : Hircan, Géburon, Simontaut, Dagoucin et Saffredent.

Dans la composition du groupe Marguerite se distingue de son modèle, qui met en scène sept femmes et trois hommes dans son Décaméron.

C’est surtout le rôle des devisants qui distingue l’œuvre de Marguerite d’autres recueils de nouvelles français du seizième siècle, comme l’indique Michel Jeanneret : « Au moment où Marguerite compose sa collection, la formule de l’alternance de récits et de dialogues est loin d’aller de soi. La tendance, en France, va plutôt dans le sens contraire : les Cent nouvelles nouvelles de Philippe de Vigneulles (entre 1505 et 1515), le Parangon de nouvelles honnnestes et delectables (1531), le Grand paragon des nouvelles nouvelles de Nicolas de Troyes (1536), de même que les Nouvelles recreations de des Periers (1558) juxtaposent les nouvelles, sans commentaires » [7].

L’identité des devisants a fait couler beaucoup d`encre. Certains critiques cherchent à y reconnaître des connaissances de Marguerite. Notamment, Lucien Febvre s`appuie sur « le motif sérieux » des anagrammes pour démontrer que Marguerite met en scène ses familiers. Selon ce système, Oisille est Louise de Savoie, la mère de Marguerite ; Hircan représente Henri d’Albret, mari de Marguerite, qui est donc elle-même représentée par la femme d’Hircan, Parlamente ; Longarine désigne Aimée Motier de la Fayette, veuve du seigneur de Longray (d’où Longarine) ; Simontault représente François de Bourdeilles, seigneur de Montauris (d’où Simontault) ; sa femme est donc la représentation narrative d`Anne de Vivonne, femme de Montauris ; Nomerfide désigne Françoise de Fiedmarcon, et son mari le mari de Nomerfide, Saffredent ; Géburon pourrait représenter Monsieur de Buyre (de Buyre l’on passe à Yebur et ensuite à Gebur (on) ) ; enfin, Dagoucin désigne Nicolas Dangus, dont « l’anagramme en tout cas semble clair : Nic. Dangu donne Dangucin »[8]. Dans ce système, seule l’identité de Parlamente et d’Oisille comme représentantes de Marguerite de Navarre et de Louise de Savoie est assez convaincante pour être reconnue par la plupart des critiques[9].

Analyse

L’amour est le sujet principal. Souvent les devisants racontent des histoires dont les personnages sont infidèles ou lubriques. Il s`agit de l`amour charnel, de la tromperie et de la malice. La Croix du Maine, dans le deuxième tome de ses Bibliothèques françoises, déclare qu’il n’arrive pas à croire que la reine de Navarre ait pu écrire des histoires si licencieuses : « Je ne sçai si ladite Princesse a composé ledit Livre, d’autant qu’il est plein de propos assez hardis, & de mots chatouilleux ».[1]

Les histoires grivoises de moines et de prêtres débauchés témoignent non seulement de l’anticléricalisme médiéval mais également de la pensée évangéliste de Marguerite.

Si Marguerite partage avec Boccace et Philipe de Vigneulles cette condamnation des abus au sein de l`église (voir, par exemple, la cinquième nouvelle, dans laquelle est raconté le sort de deux cordeliers qui voulaient violer une jeune batelière), elle est innovatrice dans l’inclusion du célèbre débat sur le parfait amant. Selon Philippe de Lajarte, c’est surtout la dix-neuvième nouvelle qui met en scène « la dialectique du parfait amour » (343) :

« J'appelle parfaictz amans, luy respondit Parlamente, ceulx qui cerchent, en ce qu'ilz aiment, quelque parfection, soit beaulté, bonté ou bonne grace; tousjours tendans à la vertu, et qui ont le cueur si hault et si honneste, qu'ilz ne veullent, pour mourir, mectre leur fin aux choses basses que l'honneur et la conscience repreuvent; car l'ame, qui n'est creée que pour retourner à son souverain bien, ne faict, tant qu'elle est dedans ce corps, que desirer d'y parvenir » (Parlamente dans la nouvelle 19).L'Heptaméron - La deuxiesme journée

Le débat du parfait amant est abordé ailleurs dans l’œuvre de Marguerite de Navarre, notamment dans sa dernière pièce de théâtre, « La comédie du parfait amant», qui fut achevée vers la toute fin de la vie de la reine[10]. Dans cette pièce, « [l]a fermeté constante n’est que l’exigence élémentaire de l’amour véritable : il exige bien plus, une dévotion totale à l’objet aimé, qui fait que l’amant s’oublie tout en lui. Thème platonicien : la reine restait fidèle à la philosophie qu’elle avait si puissamment contribué à acclimater en France dans la rhétorique d’amour. Elle n’avait pas oubliée les idées et la phraséologie qui étaient naguère de mode, vers 1542, au temps de la querelle de la Parfaite Amie »[11]?

L’Heptaméron, que Marguerite continua jusqu’à la fin de sa vie, témoigne également de ce courant platonicien en France. Dans les paroles de Parlamente, Philippe de Lajarte voit un rapport avec la doctrine néo-platonicienne de Marcel Ficin[12]. En effet, en 1546, ce fut un valet de chambre de Marguerite de Navarre, Symon Silvius, alias Jean de La Haye, qui traduisit le commentaire de Ficin sur le Banquet de Platon[13].

Les narrateurs masculins exposant les tours que font les femmes (nouvelles 30, 35) et les narratrices accusant les hommes de déloyauté, il est difficile de dégager exactement la pensée de l’auteur. Néanmoins, quelques thèmes semblent ressortir. Dans les débats entre les devisants, Oisille et Parlamente prennent souvent la parole pour faire une défense des femmes. Parlamente et Oisille sont également celles qui témoignent le plus de l’esprit évangéliste. À plusieurs reprises, elles corrigent les mauvaises interprétations des évangiles prononcées par les autres devisants.

Ainsi, on a pu parler de féminisme, de néo-platonisme, d’évangélisme. Ces dimensions existent, mais la polyphonie semble rendre difficile l’appréciation. Michel Jeanneret a écrit : « L’indécidabilité ne tient pas seulement à la diversité des devisants, elle est aussi inscrite dans la multiplicité des faits, l’immense variété des phénomènes. Une histoire ne convainc pas ? On en raconte une autre, puis une autre, et qui chacune illustre une vérité différente, si bien qu’au lieu de se compléter, les nouvelles divergent ou se contredisent. On interroge inlassablement l’amour, on tourne autour du même objet, afin de construire une vision globale, mais aucune vue cohérente ne se dégage ; les constantes sur lesquelles on comptait pour établir des lois font défaut. L’événement particulier qui devait trouver sa place dans un ordre apparaît finalement irréductible, ni typique ni imitable ; il tombe en dehors des catégories épistémologiques et morales : il est extra-ordinaire »[14].

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Notes et références

Nicole Cazauran, L’Heptaméron de Marguerite de Navarre.
2.↑ Lucien Febvre, Amour sacré Amour profane : Autour de lHeptaméron
3.↑ Simone de Reyff, éditeure, L'Heptaméron 521
4.↑ Nancy Lyman Roelker, Queen of Navarre : Jeanne d’Albret 1528-1572, Cambridge, Harvard UP, 1968, p. 248.
5.↑ Pierre Jourda, Marguerite d'Angoulême : reine de Navarre (1492-1549) : une princesse de la Renaissance.
6.↑ Michel Jeanneret, Le Défi des signes, Paradigme, Orléans, 1994, p. 70.
7.↑ Michel Jeanneret, Le Défi des signes, p. 67
8.↑ Lucien Febvre, Autour de l’Heptaméron. Amour sacré, amour profane
9.↑ Voir, par exemple, Marcel Tetel, L’Heptaméron de Marguerite de Navarre : thèmes, langage et structure, Klinkcksieck, Paris, 1991, p. 11.
10.↑ V.L. Saulnier, éd., Théâtre profane, 326
11.↑ V.L. Saulnier, éd., Théâtre profane, 328-329
12.↑ « L’Heptaméron et le ficinisme : Rapports d’un texte et d’une idéologie, » 344
13.↑ Joanna et al, La France de la Renaissance : Histoire et dictionnaire, 971
14.↑ Michel Jeanneret, Le Défi des signes


L'Heptaméron
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MessageSujet: Nouvelle cinquième, l'Heptaméron, Marguerite de Navarre  Posté leVen Fév 04, 2011 6:11 pm Répondre en citant

Marguerite de Navarre,
Heptaméron

(1559), Nouvelle cinquième, orthographe modernisée.




Dix personnages s’abritent dans une abbaye pour échapper aux intempéries. En attendant untemps plus clément, ils se racontent des histoires. Celle-ci est racontée par Guébron.
Au port à Coulon près de Niort, il y avait une batelière, qui jour et nuit ne faisait que passerchacun. Advint que deux cordeliers dudit Niort, passèrent la rivière tous seuls avec elle. Et pourceque ce passage est un des plus longs qui soit en France, pour la garder d’ennuyer vinrent à la prierd’amours : à quoi elle fit telle réponse qu’elle devait. Mais eux qui pour le travail du cheminn’étaient lassés, ni pour froideur de l’eau refroidis, ni aussi pour le refus de la femme honteux, se délibérèrent de la prendre tous deux par la force : ou si elle se plaignait la jeter dans la rivière. Elleaussi sage et fine, qu’ils étaient fous et malicieux, leur dit : « Je ne suis pas si mal gracieuse que j’enfais le semblant, mais je veux vous prier de m’octroyer deux choses, et puis vous connaîtrez quej’ai meilleure envie de vous obéir, que vous n’avez de me prier. » Les cordeliers lui jurèrent par leurbon saint François, qu’elle ne leur saurait demander chose qu’ils ne lui octroyassent, pour avoir ce qu’ils désiraient d’elle. « Je vous requiers premièrement, dit-elle, que vous me juriez et promettiez,que jamais à homme vivant nul de vous ne déclarera notre affaire » : ce qu’ils lui promirent trèsvolontiers. Ainsi leur dit : « Que l’un après l’autre veuille prendre son plaisir de moi, car j’auraistrop de honte, que tous deux me vissiez ensemble : regardez lequel me veut avoir la première. » Ilstrouvèrent très juste sa requête, et accorda le plus jeune que le vieux commencerait : et en approchant d’une petite île, elle dit au beau-père le jeune : « Dites là vos oraisons, jusques à cequ’aie mené votre compagnon ici devant en une autre île : et si à son retour il se loue de moi,nous le laisserons ici, et nous en irons ensemble. » Le jeune sauta dedans l’île, attendant le retourde son compagnon, lequel la batelière mena en autre : et quand ils furent au bord, faisantsemblant d’attacher son bateau, lui dit : « Mon ami regardez en quel lieu nous nous mettrons. » Le beau-père entra en l’île pour chercher l’endroit qui lui serait plus à propos : mais sitôt qu’elle le vità terre, donna un coup de pied contre un arbre, et se retira avec son bateau dedans la rivière,laissant ces deux beaux-pères aux déserts, auxquels elle cria tant qu’elle put : « Attendez messieurs,que l’Ange de Dieu vous vienne consoler, car de moi n’aurez aujourd’hui autre chose qui vouspuisse plaire. »
Ces deux pauvres cordeliers connaissant la tromperie, se mirent à genoux sur le bord de l’eau lapriant ne leur faire cette honte, et que si elle les voulait doucement mener au port, ils luipromettaient de ne lui demander rien. Et s’en allant toujours leur disait : « Je serais folle si aprèsavoir échappé de vos mains, je m’y remettais. » Et en retournant au village appelé son mari, etceux de la justice, pour venir prendre ces deux loups enragés, dont par la grâce de Dieu elle avait échappé de leurs dents. Eux et la justice s’y en allèrent si bien accompagnés, qu’il n’y demeura ni grand ni petit, qui ne voulut avoir part au plaisir de cette chasse. Ces pauvres fratres voyant venirsi grande compagnie se cachèrent chacun dans son île, comme Adam quand il se vit devant la facede Dieu. La honte mit leur péché devant leurs yeux, et la crainte d’être punis les faisait trembler sifort qu’ils étaient demi morts. Mais cela ne les garda d’être pris et menés prisonniers, qui ne fut pas sans être moqués et hués d’hommes et de femmes. Les uns disaient : « Ces beaux-pères nousprêchent chasteté, et puis la veulent ôter à nos femmes. » Le mari disait : « Ils n’osent toucherl’argent la main nue, et veulent bien manier les cuisses des femmes, qui sont plus dangereuses. » Lesautres disaient : « Sont sépulcres par dehors blanchis, et dedans pleins de morts et de pourriture. »Et une autre criait : « A leurs fruits connaissez-vous quels arbres sont. » Croyez que tous les passages, que l’Ecriture dit contre les hypocrites, furent là allégués contre les pauvres prisonniers :lesquels par le moyen du gardien furent recoux et délivrés, qui en grande diligence les vintdemander, assurant ceux de la justice qu’il en ferait plus grande punition que les séculiers n’ensauraient faire. Et pour satisfaire à partie, protesta qu’ils diraient tant de suffrages et prières qu’onles voudrait charger. Parquoi le juge accorda sa requête et lui donna les prisonniers, qui furent si bien chapitrés du gardien (qui était homme de bien) que oncques puis ne passèrent rivière sansfaire le signe de la croix, et se recommander à Dieu.


L’heptaméron, 6ème nouvelle


Chaque nouvelle se construit selon le schéma suivant :

Récit + discussion entre les devisants.
Elles abordent des thèmes tels que l’amour, la trahison, la fidelité, la séduction, l’égoisme…
Ces nouvelles portent un regard sur la société aristocratique de l’époque. Il y a une liaison entre les nouvelles au cours d’une journée.
On peut dresser un portrait des personnages grace aux discussions et aux références sociales.
Le prologue inscrit l’œuvre dans son contexte et la volonté de construire un décaméron francais. Les personnages passent d’une situation sauvage (ours, loups enragés..) et dramatique au calme et à la paisiblité qui pourrait quasiment se rapprocher du paradis.


6eme nouvelle
Une femme dont le mari est borgne réussi à faire sortir son amant sous le nez de son mari.

Un borgne se doute que sa femme le trompe et lui fait croire qu’il part quelques temps. Au bout de quelques minutes, il revient alors qu’elle est déjà avec son amant. Il frappe à la porte mais elle lorsqu’elle ouvre, elle lui cache son œil et laisse son amant s’enfuir.

C’est encore le schéma du trompeur trompé. C’est une vieille nouvelle du XIIeme siècle, le schéma est ancien. C’est un fabliau court et classique, une nouvelle moralisante.
Le ton est comique jusqu’à la prise de parole du mari qui lui fait la morale.
La situation et le schéma du trompeur trompé assez ancien fait rire.

Les personnages sont :
- une femme adultère rusée
- un amant invisible et étonné
- un mari vieux, borgne et souvent absent.

Thème :
Le désir amoureux

Les deux ruses :
- Première ruse : elle lui montre de grands signes d’amitiés

- Deuxième ruse : elle le fait attendre à la porte et lui cache l’œil et lui disant qu’elle revait qu’il recouvrait la vue.

Conclusion :
Son mari essayait de la tromper mais c’est elle qui finira par le tromper, bien qu’il se venge moralement et qu’il admette la ruse de sa femme.

Notes :
La nouvelle de Nomerfide décrit une femme fine mais cette fois ci en mal. Hircan est toujours en querelle mais sa femme Parlamente est fine. Il y a une grande partie du devis qui est tenue par Nomerfide et Hircan mais également par Parlamente et Hircan qui avoue que la nouvelle à suivre n’est pas une histoire personnelle pour « ne pas tourmenter sa femme » de cette manière il fait preuve une fois de plus de son manque de délicatesse.

A la rencontre des genres :

Fabliau : ce sont des vers complaisants, des contes écrits vers le XIIIeme siecle. Le récit est fictif, différents de l’estoire (faits authentiques). La mise en scène est différente de celle du roman car elle ne relate qu’une seule histoire. Il a une volonté de divertissement et fait généralement rire par une intrigue amoureuse triangulaire où le mari est berné. Il représente la force de la ruse et évoque des scènes simples de la vie quotidienne.

Quelles sont les raisons qui font apparaître le rire ? la joie d’assister à la punition des méchants, le fait d’en savoir plus que les personnages, les déconvenues d’autrui, le plaisir de violer par personnes interposées les tabous et les interdits, le plaisir d’oublier un instant les soucis du monde, la grivoiserie, la crudité et la vulgarité des expressions, la figure triomphante de la femme qui incarne la ruse, les valeurs morales et religieuses oubliées pour créer le plaisir… sont autant de raisons qui font apparaître le rire.
Les auteurs attaquent beaucoup les pretresà cause de leur désir violent de la chasteté et de leur libertinage.

Nouvelle : elle est liée aux autres genres de l’époque. Sa forme brève écrite en termes concits et joyeux est un fait récent à la Renaissance.


Exposé du site membres.multimania.fr
http://membres.multimania.fr/drweb666/Navarre,%20heptam%E9ron.doc.



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L'humanisme
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Atelier écriture :

Ecriture d'invention sur l'humanisme
Sujet :
écrire « la nouvelle sixième » proposée par un autre personnage de l’Héptaméron. La nouvelle devra illustrer une leçon de morale dans la lignée de l’humanisme.
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Un mouvement littéraire, l'humanisme


études sur Rabelais :
Prologue de Gargantua, Rabelais
http://corrigesdubacfrancais.blogspot.com/2010/01/prologue-de-garguantua-rabelais.html
Rabelais, Gargantua, chapitre XXI
http://corrigesdubacfrancais.blogspot.com/2010/01/gargantua-rabelais-chapitre-xxi.html
Rabelais, Gargantua, chapitre XXV
http://corrigesdubacfrancais.blogspot.com/2010/01/rabelais-gargantua-chapitre-xxv.html
Rabelais, Gargantua, chapitre 44
http://corrigesdubacfrancais.blogspot.com/2010/01/rabelais-gargantua-chapitre-44.html
Rabelais, Gargantua, chapitre 55
http://corrigesdubacfrancais.blogspot.com/2010/01/rabelais-gargantua-chapitre-55.html[/quote]
Lettre VIII de Gargantua à Pantagruel
http://corrigesdubacfrancais.blogspot.com/2010/10/lettre-viii-de-gargantua-pantagruel.html

Montaigne
Des Cannibales, chapitre 31, Montaigne
http://corrigesdubacfrancais.blogspot.com/2010/09/des-cannibales-chapitre-31-montaigne.html
Montaigne, les Essais, livre I, XXVIII, questions problématiques et ouvertures
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Stefan zweig
Stefan zweig, Erasme
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Erasme
Erasme, Eloge de la folie, préface
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