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 DU BREVET AU BAC :: LECTURES ANALYTIQUES ET COMMENTAIRES :: Nerval, Laisse moi, commentaire 2sde

Nerval, Laisse moi, commentaire 2sde

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MessageSujet: Nerval, Laisse moi, commentaire 2sde  Posté leMer Mar 27, 2013 7:53 pm Répondre en citant

Méthodologie du commentaire ; bilan de la séquence n°2

consacrée à la poésie romantique.




Sujet : Vous ferez un commentaire du texte suivant.





Laisse-moi !

Non, laisse-moi, je t'en supplie ;
En vain, si jeune et si jolie,
Tu voudrais ranimer mon coeur :
Ne vois-tu pas, à ma tristesse,
Que mon front pâle et sans jeunesse
Ne doit plus sourire au bonheur ?

Quand l'hiver aux froides haleines
Des fleurs qui brillent dans nos plaines
Glace le sein épanoui,
Qui peut rendre à la feuille morte
Ses parfums que la brise emporte
Et son éclat évanoui !

Oh ! si je t'avais rencontrée
Alors que mon âme enivrée
Palpitait de vie et d'amours,
Avec quel transport, quel délire
J'aurais accueilli ton sourire
Dont le charme eût nourri mes jours.

Mais à présent, Ô jeune fille !
Ton regard, c'est l'astre qui brille
Aux yeux troublés des matelots,
Dont la barque en proie au naufrage,
A l'instant où cesse l'orage
Se brise et s'enfuit sous les flots.

Non, laisse-moi, je t'en supplie ;
En vain, si jeune et si jolie,
Tu voudrais ranimer mon coeur :
Sur ce front pâle et sans jeunesse
Ne vois-tu pas que la tristesse
A banni l'espoir du bonheur ?




Gérard de Nerval, recueil Poésies diverses (1855).



Commentaire de Clotilde P. :




Le romantisme est le mouvement littéraire dominant au XIXème siècle. Il permet d'épancher ses sentiments les plus intimes et intenses à travers l'écriture ; ses thématiques principales sont le lyrisme heureux ou malheureux, la fuite du temps, l'amour de la nature ainsi que la recherche d'exotisme. Gérard de Nerval, auteur du texte à commenter, appartient à ce mouvement littéraire et la publication en 1855 de son recueil Poésies diverses révèle ses derniers poèmes puisqu'il meurt la même année. Laisse-moi ! , poème extrait de ce recueil, est un exemple de refus de l'amour de l'auteur face à un amour impossible. Dans ce poème, l'auteur exprime un lyrisme amoureux douloureux ainsi que la projection de celui-ci sur la nature.



En premier lieu, il serait intéressant d'étudier le lyrisme douloureux que le poète exprime dans le texte. Dès la première strophe, l'anaphore "laisse-moi" (v.1 et 2) qui exprime un rejet, permet de se rendre compte de l'humeur malheureuse du poème. La demande "je t'en supplie", présente dans la première et la dernière strophe (v.2 et 26) renforce le registre lyrique. Ces deux strophes sont quasiment en anaphore par leur grande ressemblance et le lyrisme qui y est exprimé en est donc rendu encore plus intense.

De même, la vieillesse peut être considérée dans ce poème comme le principal facteur du lyrisme douloureux. En effet, elle est visible dès la première strophe avec le "front" (v.6) défini par les termes "pâle et sans jeuness" (v.6). Le coeur, siège des sentiments et de la vie est associé au verbe "ranimer" (v.4) ; cette association de termes permet l'expression de la vieillesse, autant celle des sentiments que celle de la vie. Cette vieillesse et la renaissance vaine du coeur mènent à la mort des sentiments heureux. On voit cela grâce à la négation "ne doit plus sourire au bonheur" (v.7). La présence de nombreux verbes conjugués à l'imparfait tels que "je t'avais" (v.14), "j'aurais" (v.1Cool et "palpitait" (v.16) évoquent la jeunesse passée de l'auteur et donc son sentiment douloureux lorsqu'il y repense. Dans ce passé regretté, les sentiments intenses étaient également présents, sentiments qu'il est possible de qualifier d'hyperboliques comme "transport" ou "délire" (v.17). Une allitération en [R] avec "rencontrée" (v.14), "enivrée" (v.15) "transport" et "sourire" (v.15 et 17) évoque également ce regret de l'époque passée. Tout cela met un accent sur le lyrisme exprimé par le poète dans ce poème.

Il serait également intéressant de voir la différence évidente qui existe entre les deux protagonistes, à savoir l'auteur et une jeune fille qu'il aime. Cette différence est identifiable grâce à la caractérisation que Gérard de Nerval fait de cette femme : il la qualifie de "jeune et "jolie" (v.3 et 27), et l'invocation "Ô" suivie de l'expression "jeune fille" (v.20) contraste avec l'âge avancé de Gérard de Nerval : lorsqu'il écrit ce poème, il en est à la fin de sa vie. L'oxymore "éclat évanoui" (v.13) renforce également cette idée de contraste et de différence qui rend impossible un amour entre ces deux êtres et qui amplifie les sentiments douloureux du poète.


En second lieu, il serait possible de s'intéresser au milieu que l'auteur utilise pour exprimer ses sentiments intenses, à savoir la Nature. Cette projection est remarquable majoritairement aux strophes 2 et 4 et est introduite par l' "hiver" (v.Cool qui évoque une saison où tout meurt et s'endort et montre donc bien grâce à la Nature l'état dans lequel se trouve l'auteur lorsqu'il écrit ce poème. Cet hiver "glace" (v.10) "les fleus épanouies" (v.9), les empêche donc de se développer davantage. L'idée de mort est aussi présente et est associée à une "feuille" (v.11), élément naturel qui permet à l'auteur la projection de ses sentiments sur la Nature.

De plus, la métaphore qui est faite dans l'ensemble de la quatrième strophe est très représentative de la projection des sentiments de l'auteur sur la Nature. Il est question dans cette strophe de "naufrage" et d' "orage" (v.23/24), termes qui renforcent la thématique de la projection des sentiments sur la Nature. L'effet que la femme aimée a sur l'homme est représentée par le naufrage de "la barque" (v.23) "des matelots"(v.22). Cette femme, qualifiée d' "astre" (v.21), peut être représenté comme la dernière chose que l'on voit avant de mourrir, la Nature est donc au diapason des sentiments et de la situation de l'auteur.

Enfin, cette projection sur la Nature des sentiments de l'auteur rend visible le chiasme que forme le poème dans sa structure : la première et la dernière strophe ont pour thématique le lyrisme douloureux du poète, la deuxième et la quatrième strophe évoquent la projection ce ces sentiments sur la Nature. Au milieu de ces quatre strophes, la troisième strophe évoque le passé heureux virtuel du poète. Ce chiasme peut exprimer le rapprochement des deux personnages grâce à l'amour, malgré leur nombreuses différences. On pourrait également parler de symétrie qui forme un miroir amoureux.



Gérard de Nerval, dans son poème Laisse-moi ! fait donc apparaitre deux des grandes thématiques romantiques. Il est incapable par sa vieillesse de rendre une jeune femme heureuse ou même d'être lui-même heureux. Il se voit donc obligé de renoncer à l'amour qu'il a pour cette jeune et jolie femme. D'autres auteurs tels que Lamartine, lui aussi auteur romantique ont écrit des poèmes au lyrisme douloureux, par exemple lors d'une séparation forcée avec l'être aimé.



Clotilde P., 2nde section internationale, lycée international de Valbonne Sophia-Antipolis, février 2007.





Commentaire de David M. :



Le Romantisme est le courant littéraire principal du XIXème siècle. Il s’oppose totalement au Classicisme en se concentrant sur les émotions et les sentiments ressentis par l’écrivain. Gérard de Nerval, auteur du poème « Laisse-moi ! », est un des principaux poètes de ce courant. Le poème dont il est question, publié en 1855 dans le recueil Poésies diverses, narre la rencontre entre le poète et une jeune fille, et la tristesse éprouvée à cause de l’impossibilité d’une relation amoureuse entre eux. Il est question dans ce poème de la tristesse qu’éprouve le poète, ainsi que de sa nostalgie des joies du passé.


Dans ce poème, Nerval fait usage du registre lyrique pour exprimer la tristesse ressentie lorsqu’il se voit contraint de ne pas avoir de relation amoureuse avec la jeune fille. Ce rejet est fait de manière directe, bien qu’il soit douloureux, et cela est montré par plusieurs procédés. Par exemple, le verbe « laisse-moi », au mode impératif, est utilisé en anaphore aux vers 1, 2 et 26, illustrant parfaitement l’intention du poète de n’entamer aucune relation avec la jeune fille. De plus, l’usage de phrases exclamatives (aux vers 1, 13 et 20) ainsi que l’interjection « Oh ! » au vers 14 renforcent l’idée de la fermeté du poète. Par ailleurs, la tournure négative « ne vois-tu pas », aux vers 5 et 30, représente les sentiments douloureux qu’engendre le rejet de la jeune fille par Nerval.

Cependant, le poète fait également part des raisons de sa décision, aussi douloureuse soit-elle. On note par exemple l’association de la « tristesse » du poète à son « front pâle et sans jeunesse » (vers 5, 6, et 29, 30), mettant ainsi en cause sa vieillesse. Ce problème est ensuite évoqué dans la quatrième strophe, lorsque le poète compare ses yeux aux « yeux troublés des matelots » l’empêchant d’admirer la beauté et le regard de la jeune fille. Un autre exemple est le tutoiement employé par le poète (« tu voudrais » vers 4, « ne vois-tu pas » vers 5, « ton regard » vers 21) illustrant à nouveau sa différence d’âge avec la jeune fille. Tous ces procédés insistent clairement sur l’impossibilité d’une relation amoureuse et renforcent le lyrisme douloureux du poème, exprimant le malheur profond du poète.



L’expression de la tristesse causée par le rejet d’une éventuelle relation amoureuse entraîne également la nostalgie du poète, qui est par ailleurs une autre grande thématique du Romantisme. On assiste d’abord à une exaltation du poète lorsqu’il se remémore les joies du passé, mais cette joie n’est que fausse et éphémère. Par exemple, l’emploi de l’expression « ranimer mon cœur » aux vers 4 et 28 indique que le poète a probablement connu le bonheur amoureux, mais aussi que celui-ci est maintenant passé. Dans la troisième strophe, Nerval énumère les bonheurs que la jeune fille et lui auraient pu connaître en faisant abstraction de leur différence d’âge, avec le champ lexical de la joie et du plaisir (« âme enivrée » vers 15, « vie », « amours » vers 16, « transport », « délire » vers 17, « sourire » vers 18 et « charme » vers 19). Cependant, l’emploi du plus-que-parfait « avais rencontrée » au vers 14 montre que tous ces bonheurs sont passés et sont maintenant impossibles. Ces procédés illustrent donc la nostalgie de Nerval, qui sait que les moments heureux qu’il se remémore sont perdus à jamais.

Le poète, après avoir éprouvé cette fausse exaltation, retourne dans le moment présent bien que la réalité soit dure à accepter. Ce retour est d’abord exprimé par l’adverbe « à présent », au vers 20. Puis, Nerval qualifie la beauté de la jeune fille de « vain[e] » (vers 27) : il renonce définitivement à elle. Cela est également montré par l’emploi du passé composé « a banni l’espoir du bonheur » (vers 31) : cet espoir est perdu. Nerval sait que sa nostalgie du passé est, à l’instar de la beauté de la jeune fille, vaine ; il retourne donc douloureusement à la réalité.



L’expression des sentiments douloureux du poète, ainsi que la nostalgie qu’il évoque, permettent de classer ce poème dans le courant littéraire romantique. On peut voir dans ce poème une part autobiographique majeure ; ce procédé a d’ailleurs largement été utilisé par des auteurs romantiques tels Lamartine ou Hugo, s’inspirant de leurs relations amoureuses ou de pertes d’êtres chers pour l’écriture de leurs œuvres.



David M., 2nde section internationale, lycée international de Valbonne Sophia-Antipolis, février 2007.




http://www.ac-nice.fr/lettres/civ/articles.php?lng=fr&pg=26
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