DU BREVET AU BAC Préparation au brevet et au bac de français, philosophie et HLP
|
|
|
|
Auteur |
Message |
clarisse78
Age: 31 Inscrit le: 12 Mar 2011 Messages: 28
|
Sujet: Rabelais, Gargantua, chap 55, l'abbaye de thélème Sam Avr 16, 2011 12:14 pm |
|
|
François Rabelais, Gargantua, chapitre LV
Problématique : En quoi peut-on dire que le système décrit ici par Rabelais incarne une utopie basée sur des idéaux humanistes ?
Introduction : (Extrait de Gargantua (1534) )
Les actions du géant Gargantua sont l’occasion, pour Rabelais, d’envisager de nombreuses questions d’actualité, et de réfléchir sur ce que serait une société idéale. L’abbaye de Thélème en constitue une illustration : les chapitres L à LV précisent les circonstances de sa création, son architecture, ceux qui sont destinés à y habiter. Le chapitre LV expose la manière dont on y vit.
I) Une abbaye peu conventionnelle
1) La population
- Dans une abbaye, voeux à l’entrée :
o Pauvreté : or, ici, vie basé sur la tenue, les loisirs : « joliment » ; « si élégantes, si mignonnes »
+ élite de la société : champ lexical de la noblesse "biens nés / honneur / noble / noblement / honnête" ; Elite sociale = aristocratie
donc ils ne sont pas pauvres mais élégants : opposé au vœux de pauvreté
+ Insistance sur la richesse / une Abbaye est censée être austère... ("montées sur de belles haquenées, avec leur palefroi richement harnaché, sur le poing mignonnement engantelé")
o Chasteté : or, abbaye mixte : « les dames » l.8, « les hommes » l.23, « l’un ou l’une d’entre eux » l. 16, « parmi eux homme ni femme […] » l.26
+ formation de couples et mariage par la suite à la sortie ! « « quand […] l’un d’entre eux […] voulait quitter l’abbaye, il emmenait avec lui l’une des dames […] et ils se mariaient »
o Réclusion : ici, ils quittent l’abbaye qd ils le « voulaient » (vb de volonté) : séjour temporaire.
o Dévotion et soumission à dieu : aucune allusion à dieu = étrange
+ la devise de saint augustin était « aime Dieu et fais ce que tu veux »
Ici, c’est « fais ce que voudras » : dieu disparaît dans cette devise.
+ on ne prit plus dieu. = absence de règle religieuse sauf le mariage de la fin.
- Les Thélèmes agissent selon leur propre volonté
Rabelais est issu d’un enseignement monastique, lui-même ayant suivi un début de carrière religieuse. Dans sa description de l’utopie, il montre cependant les séquelles de l’enseignement strict qu’il a reçu. L’obédience n’est absolument pas respectée ici. La chasteté sexuelle est respectée dans l’enceinte du couvent, mais pas la chasteté sentimentale : il est questions de relations amoureuses ici. La noblesse incarnée par les jeunes gens montre que la pauvreté n’est pas respectée non plus.
2) La vie à l’abbaye : un esprit de liberté
- Vie repose sur devise "Fais ce que voudras": système repose donc sur liberté totale: Champ lexical liberté+opposition sujétion/liberté
- Pas d'horaires stricts, de tenue imposée, de règlement: peuvent sortir quand ils veulent "soit à la demande de ses parents soit pour une autre cause"
- Liberté soulignée par énumération: "bon vouloir et libre-arbitre/quand bon leur semblait/quand le désir leur en venait"
- La règle n'est qu'une contrainte : Champ lexical = « obligeait » (l.4) ; « imitait » (l.5) ; « asservis » ; « sujétion » ; « contrainte » (l.11) ; « joug de la servitude » (l.13)
Champ lexical de la règle = « loi », « statut », « règles » (l.1), « règlement » (l.4)...
Soumission : contraire de la nature de l'homme
« Nous » (l .13/14) => tous les hommes + le narrateur
La thèse de Rabelais est donc que les hommes ont " par nature " le sens de l’honneur et de la responsabilité et sont poussés à faire le bien et que ce sont les contraintes qui les contraintes les pousse au vice.
II) Une utopie humaniste
Utopie pas d'évolution parce que figé hors du temps => dans la logique évolution synonyme de progrès dans le temps. (paradoxe)
1) Une utopie, (donc un modèle qui a ses limites)
- Texte construit sous la forme d'un éloge, société idéale, utopique : hyperbole (exagération), énumération...
- toutes les qualités sans les habituels défauts qui vont avec. Enumération renforce le sentiment de perfection de ces gens: "Jamais ne furent vus...celles-là"
- Activités communes (3e paragraphe)
- Ont naturellement le sens de l'honneur et des responsabilités "par nature un instinct et un aiguillon qui pousse toujours vers la vertu et retire du vice; c'est ce qu'ils nommaient l'honneur"
TOUT EST PARFAIT (exemple : comparatif, superlatif, globalisant, aucune nuance)
Le mode de vie des Thélèmes se base sur la totale liberté des faits et des gestes de chacun, si un des leurs contrarie cette dernière alors le système s’écroule. C’est pour cela que Rabelais rappelle l’importance de l’éducation dans son fragile système.
2) Des idéaux humanistes « Un esprit saint dans un corps saint »
- L'Homme est au centre de la vie quotidienne: insistance sur l'abnégation du groupe en faveur de l'individu (alternance singulier/pluriel)
- Excellente éducation " bien construit " importance de l’éducation humanistes: activités raffinées « lire, écrire, chanter...en prose »
- Valeur de l'humanisme : « COMMENT RENDRE L'HOMME MEILLEUR ? »
éducation : valeur absolue par l’humanisme : ici parfaite car ils savent tout faire
éducation artistique (musique, poésie, composition...), sportive, cosmopolite (polyglotte) et érudite
Conclusion possible:
-Gargantua précède Pantagruel (1536) dans Le Cycle des Géants. Critique des guerres (avec la guerre Pichrocoline) et présente une société parfaite qui donnerait envie à ses contemporains de changer.
-Cependant, le système reste fragile, si un individu agit contre la liberté des Thélémites, tout s'effondre. C'est pourquoi l'éducation est ici très importante.
-Rabelais fait de ce texte une utopie humaniste en imaginant une microsociété qui place l'individu au centre de tout, conformément à l'idéologie humaniste ("L'Homme est au centre de l'Univers")
(-Lien avec l'Eldorado (Chapitre 8 de Candide de Voltaire), où est décrite une société isolée du monde extérieur)
-Autre lien avec l'Utopie de Thomas More (1516): cadre inconnu avec de nouvelles valeurs : Rabelais dresse ici un lieu idéal, Thélème est une utopie, mais elle à des limites parce qu'on est obligé d'être libre et d'avoir l'esprit grégaire (de troupeau)
Critique de la société actuelle, les interdits fixés par l'Eglise : François Rabelais, moine qui exerça surtout la profession de médecin.
Une critique de la noblesse du XVIème siècle qui passe son temps dans l’oisiveté, les plaisirs (peu d’allusions au travail dans le texte).
Texte situé à la fin de Gargantua : une conclusion qui rappelle les idées de l’humaniste Rabelais. Confiance totale en la nature humaine, pas question d’admettre des notions de pêché originel.
LE TEXTE:
Toute leur vie était dirigée non par les lois, statuts ou règles, mais selon leur bon vouloir et libre-arbitre. Ils se levaient du lit quand bon leur semblait, buvaient, mangeaient, travaillaient, dormaient quand le désir leur venait. Nul ne les éveillait, nul ne les forçait ni à boire, ni à manger, ni à faire quoi que ce soit... Ainsi l'avait établi Gargantua. Toute leur règle tenait en cette clause :
FAIS CE QUE VOUDRAS,
car des gens libres, bien nés, biens instruits, vivant en honnête compagnie, ont par nature un instinct et un aiguillon qui pousse toujours vers la vertu et retire du vice; c'est ce qu'ils nommaient l'honneur. Ceux-ci, quand ils sont écrasés et asservis par une vile sujétion et contrainte, se détournent de la noble passion par laquelle ils tendaient librement à la vertu, afin de démettre et enfreindre ce joug de servitude; car nous entreprenons toujours les choses défendues et convoitons ce qui nous est dénié.
Par cette liberté, ils entrèrent en une louable émulation à faire tout ce qu'ils voyaient plaire à un seul. Si l'un ou l'une disait : " Buvons ", tous buvaient. S'il disait: "Jouons ", tous jouaient. S'il disait: " Allons nous ébattre dans les champs ", tous y allaient. Si c'était pour chasser, les dames, montées sur de belles haquenées, avec leur palefroi richement harnaché, sur le poing mignonne- ment engantelé portaient chacune ou un épervier, ou un laneret, ou un émerillon; les hommes portaient les autres oiseaux.
Ils étaient tant noblement instruits qu'il n'y avait parmi eux personne qui ne sût lire, écrire, chanter, jouer d'instruments harmonieux, parler cinq à six langues et en celles-ci composer, tant en vers qu'en prose. Jamais ne furent vus chevaliers si preux, si galants, si habiles à pied et à cheval, plus verts, mieux remuant, maniant mieux toutes les armes. Jamais ne furent vues dames si élégantes, si mignonnes, moins fâcheuses, plus doctes à la main, à l'aiguille, à tous les actes féminins honnêtes et libres, qu'étaient celles-là. Pour cette raison, quand le temps était venu pour l'un des habitants de cette abbaye d'en sortir, soit à la demande de ses parents, ou pour une autre cause, il emmenait une des dames, celle qui l'aurait pris pour son dévot, et ils étaient mariés ensemble; et ils avaient si bien vécu à Thélème en dévotion et amitié, qu'ils continuaient d'autant mieux dans le mariage; aussi s'aimaient-ils à la fin de leurs jours comme au premier de leurs noces.
Gargantua, livre LVII (1534).
Version modernisée |
|
|
|
Prépabac, examen2017 Administrateur
Age: 59 Inscrit le: 07 Déc 2009 Messages: 6069 Localisation: versailles
|
Sujet: Rabelais, Gargantua, chap 55, l'abbaye de thélème Lun Avr 18, 2011 8:08 am |
|
|
bonjour Clarisse
Ta lecture analytique est très bien pas très longue mais très bien. Merci à toi. _________________ Du BREVET AU BAC |
|
|
|
|
|
Page 1 sur 1 |
|
Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
| |
|
|