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Brevet de français corrigé, Giono voyageur immobile

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Prof de français lycée,
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MessageSujet: Brevet de français corrigé, Giono voyageur immobile  Posté leMer Jan 21, 2015 5:18 pm Répondre en citant

Partie 1
EXTRAIT D'ŒUVRE


Voilà l'épicerie-mercerie de Mlle Alloison. Ah ! Mlle Alloison ! Un long piquet avec une charnière au milieu. […] Elle savait par coeur ce que je venais chercher ; elle rentrait dans sa cuisine et elle me laissait seul dans l'épicerie.

Il n'y avait qu'une lampe à pétrole pendue dans un cadran de cuivre. On semblait être dans la poitrine d'un oiseau : le plafond montait en voûte aiguë dans l'ombre. La poitrine d'un oiseau ? Non, la cale d'un navire. Des sacs de riz, des paquets de sucre, le pot de la moutarde, des marmites à trois pieds, la jarre aux olives, les fromages blancs sur des éclisses, le tonneau aux harengs. Des morues sèches pendues à une solive jetaient de grandes ombres sur les vitrines à cartonnages où dormait la paisible mercerie, et, en me haussant sur la pointe des pieds, je regardais la belle étiquette du « fil au Chinois ». Alors, je m'avançais doucement, doucement ; le plancher en latte souple ondulait sous mon pied. La mer, déjà, portait le navire. Je relevais le couvercle de la boîte au poivre. L'odeur. Ah ! cette plage aux palmiers avec le Chinois et ses moustaches. J'éternuais. « Ne t'enrhume pas, Janot. - Non, mademoiselle. » Je tirais le tiroir au café. L'odeur. Sous le plancher l'eau molle ondulait : on la sentait profonde, émue de vents magnifiques. On n'entend plus les cris du port.

Dehors, le vent tirait sur les pavés un long câble de feuilles sèches. J'allais à la cachette de la cassonade. Je choisissais une petite bille de sucre roux. Pendant que ça fondait sur ma langue, je m'accroupissais dans la logette entre le sac des pois chiches et la corbeille des oignons ; l'ombre m'engloutissait : j'étais parti.


Jean GIONO, « Le Voyageur immobile », Rondeur des jours, L'Eau vive I, 1943
QUESTIONS

Répondre aux questions suivantes.15 points

I« Elle savait par cœur ce que je venais chercher. » D'après vous que vient chercher le narrateur dans l'épicerie de Mlle Alloison ? 2 points

IIQuel âge donnez-vous au narrateur ? Justifiez votre réponse.2points

IIIPourquoi le narrateur a-t-il l'impression d'être dans la cale d'un navire ? Vous donnerez plusieurs raisons en prenant en compte tout le texte.3 points

IVComparez les deux phrases suivantes : quelle métamorphose se produit entre les deux ? 1point

- « le plancher en latte souple ondulait sous mon pied. »

- « Sous le plancher l'eau molle ondulait »

V« L'odeur. » Quelle remarque grammaticale pouvez-vous faire sur la construction de la phrase ? Pourquoi cette phrase est-elle répétée ? 2 points

VI« On n'entend plus les cris du port » :2 points

AA quel temps est le verbe de la phrase ?

BQuel était le temps principal du texte avant cette phrase ?

CQuel est l'effet produit par le changement de temps ?

VIIQuel rapport voyez-vous entre le titre « Le Voyageur immobile » et le texte ? 1 point

VIIIDans quel univers l'enfant puise-t-il son imagination ? Pouvez-vous faire des rapprochements avec des livres que vous avez lus ou des films que vous avez vus ? Expliquez ce qui vous fait penser à ces livres ou ces films.2 points

RÉÉCRITURE


Vous transposerez au présent et à la troisième personne du singulier le passage suivant.4 points
EXTRAIT D'ŒUVRE

« J'allais à la cachette de la cassonade. Je choisissais une petite bille de sucre roux. Pendant que ça fondait sur ma langue, je m'accroupissais dans la logette entre le sac des pois chiches et la corbeille des oignons ; l'ombre m'engloutissait : j'étais parti. »

DICTÉE

Le narrateur, puni dans une salle d'étude, a trouvé un livre, Robinson Crusoé, et s'est mis à lire.6 points


Lors de l'épreuve réelle, le texte est dicté par l'examinateur. Ici, le texte comporte des fautes. Il faut donc le recopier en corrigeant toutes les fautes.
EXTRAIT D'ŒUVRE

II est nuit. […]

Je frotte mes yeux, je tend mon regard, les lettres s'effacent, les lignes se melent, je saisie encore le coin d'un mot, puis plus rien.

J'ai le coup brisé, la nuque qui me fait mal, la poitrine creuse ; je suis rester penché sur les chapitres sans levé la tête, sans entendre rien, dévoré par la curiosité, collé aux flans de Robinson, pris d'une émotion immense, remué jusqu'au fond de la cervelle et jusqu'au fond du coeur ; et en ce moment ou la lune montre la-bas un bout de corne, je fais passer dans le ciel tous les oiseaux de l'île, et je vois se profilé la tête longue d'un peupliet comme le mat du navire de Crusoé ! Je peuple l'espace vide de mes penser, tout comme il peuplait l'horizon de ses craintes ; debout contre cette fenêtre, je rêve à l'éternelle solitude et je me demande ou je ferai pousser du pain…


Jules Vallès, L'Enfant, 1879


Partie 2
RÉFLEXION


Pensez-vous que le monde où vous vivez aujourd'hui laisse encore place à la rêverie ? Vous présenterez votre réflexion dans un développement organisé. Votre texte fera au moins deux pages.15 points
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MessageSujet: Brevet de français corrigé, Giono voyageur immobile  Posté leMer Jan 21, 2015 5:20 pm Répondre en citant

Partie 1 : la correction

QUESTIONS

Répondre aux questions suivantes.15 points


I« Elle savait par cœur ce que je venais chercher. » D'après vous que vient chercher le narrateur dans l'épicerie de Mlle Alloison ?

Le narrateur vient d'abord chercher de la nourriture exotique, comme la petite bille de sucre roux, qui éveille son sens gustatif. Ainsi, l'éveil de son sens du goût le fait voyager non en réalité du moins en imagination. Mais la boutique de Mlle Alloison représente surtout pour le narrateur un moyen d'évasion : le goût et les odeurs exotiques qu'ils découvrent chez Mlle Alloison éveillent ses sens et stimulent aussi bien son imagination que sa capacité à s'immerger dans un monde rêvé, onirique.

IIQuel âge donnez-vous au narrateur ? Justifiez votre réponse.

Le narrateur est vraisemblablement un enfant. Plusieurs indices permettent d'aboutir à cette conclusion. Tout d'abord, le narrateur est de petite taille : il doit se « hausser sur la pointe des pieds » pour regarder ce qu'il y a sur les étagères du magasin mais il est également suffisamment petit pour pouvoir s'accroupir « dans la logette entre le sac des pois chiches et la corbeille des oignons ». Enfin, Mlle Alloison l'appelle par son surnom, « Janot ». Il est plus probable que Mlle Alloison appelle par ce diminutif affectueux un enfant qu'un adulte.

IIIPourquoi le narrateur a-t-il l'impression d'être dans la cale d'un navire ? Vous donnerez plusieurs réponses en prenant en compte tout le texte.

Tout d'abord le narrateur a l'impression d'être dans la cale d'un navire du fait de la forme même de l'épicerie-mercerie : une petite pièce sans fenêtre dont la forme lui rappelle celle d'un navire (« le plafond montait en voûte aiguë dans l'ombre ») et dont la seule source de lumière, qui provient d'une lampe à pétrole, accentue le caractère fermé de la pièce. Ensuite, les réserves de nourriture de l'épicerie, décrites par l'accumulation des lignes 6 et 7 du texte, rappellent au narrateur les réserves que les marins entassent dans la cale de leur navire lors de leurs voyages. En outre, le mélange des odeurs exotiques qui émanent de ces réserves évoque au narrateur des mondes exotiques qu'il associe à l'idée de voyage. Par ailleurs, la souplesse des lattes du plancher et leur ondulation quand il marche dans la boutique reproduisent selon lui le mouvement ondulatoire d'un navire sur l'eau. Enfin, le bruit du vent dehors évoque certainement au narrateur le bruit vent lorsqu'un bateau navigue en mer.

IVComparez les deux phrases suivantes : quelle métamorphose se produit entre les deux ?

« Le plancher en latte souple ondulait sous mon pied.»

« Sous le plancher l'eau molle ondulait. »

Il existe un parallélisme syntaxique entre les deux phrases suivantes : le verbe est le même (« ondulait ») et elles comprennent toutes les deux un complément circonstanciel. Pourtant, la métamorphose qui se produit entre les deux phrases est le passage de la réalité au rêve. En effet, dans la première phrase, bien que le narrateur associe aux ondulations d'un navire les ondulations du plancher, l'on reste toutefois dans le réel. Le complément circonstanciel « sous mes pieds » rattache le narrateur à la réalité, en le rattachant physiquement à l'épicerie-mercerie de Mlle Alloison. Dans la deuxième phrase, le fait que l'eau devienne le sujet du verbe « ondulait » marque le massage de la réalité au rêve du narrateur.

V« L'odeur. » Quelle remarque grammaticale pouvez-vous faire sur la construction de la phrase ? Pourquoi la phrase est-elle répétée ?

La phrase « L'odeur. » ne comporte pas de verbe conjugué, elle est seulement composée d'un groupe minimal (l'article défini élidé « l' » et le nom commun « odeur »). La répétition de la phrase permet de souligner l'importance de la stimulation olfactive sur l'imagination du narrateur lorsqu'il découvre de nouvelles odeurs: les odeurs qui émanent de l'épicerie de Mlle Alloison sont les déclencheurs du rêve du narrateur. Ces odeurs fortes et exotiques sont la source d'un véritable voyage olfactif pour le narrateur

VI« On n'entend plus les cris du port »

AA quel temps est le verbe de la phrase ?

Le verbe de la phrase est au présent de l'indicatif.

BQuel est le temps principal du texte avant cette phrase ?

L'imparfait de l'indicatif était le temps principal du texte avant cette phrase.

CQuel est le temps produit par le changement de temps ?

L'utilisation d'un verbe au présent de l'indicatif dans un texte écrit à l'imparfait permet de donner plus de réalité aux faits. Dans cette phrase, l'utilisation d'un présent de narration permet de donner plus de réalité au rêve du narrateur, comme si l'épicerie-mercerie de Mlle Alloison s'était réellement métamorphosée en bateau qui s'éloigne peu à peu du port. En effet, si l'imparfait est le temps de la description, le présent de l'indicatif nous plonge dans le rêve du narrateur en l'actualisant.

VIIQuel rapport voyez-vous entre le titre « Le Voyageur immobile » et le texte ?

L'épithète « immobile » du titre renvoie au fait que le narrateur voyage en pensée et non pas en acte. En effet, dans l'extrait proposé, le narrateur effectue un voyage par le biais de son imagination dont les causes sont des stimulations sensorielles tout en restant dans l'épicerie-mercerie de Mlle Alloison.

VIIIDans quel univers l'enfant puise-t-il son imagination ? Pouvez-vous faire des rapprochements avec des livres que vous avez lus ou des films que vous avez vus ? Expliquez ce qui vous fait penser à ces livres ou à ces films.

L'enfant puise son imagination dans l'univers des récits de voyage et de découverte de nouvelles régions du monde. L'on peut ainsi penser aux récits de voyage de Marco Polo qui enrichirent l'imaginaire de son époque sur l'Extrême-Orient. L'on peut également penser que l'imaginaire de l'enfant prend sa source dans des romans comme Le Tour du Monde en quatre-vingt jours de Jules Verne ou des Vendredi ou la vie sauvage de Michel Tournier. Ces romans ont en commun le fait que ce sont des romans d'aventure et de découverte.

RÉÉCRITURE

Vous transposerez au présent et à la troisième personne du singulier le passage suivant :4 points


« Il va à la cachette de la cassonade. Il choisit une petite bille de sucre roux. Pendant que ça fond sur sa langue, il s'accroupit dans la logette entre le sac des pois chiches et la corbeille des oignons ; l'ombre l'engloutit : il est parti. »

DICTÉE

Le narrateur, puni dans une salle d'étude, a trouvé un livre, Robinson Crusoé, et s'est mis à lire.6 points


II est nuit. […]

Je frotte mes yeux, je tends mon regard, les lettres s'effacent, les lignes se mêlent, je saisis encore le coin d'un mot, puis plus rien.

J'ai le cou brisé, la nuque qui me fait mal, la poitrine creuse ; je suis resté penché sur les chapitres sans lever la tête, sans entendre rien, dévoré par la curiosité, collé aux flancs de Robinson, pris d'une émotion immense, remué jusqu'au fond de la cervelle et jusqu'au fond du coeur ; et en ce moment où la lune montre là-bas un bout de corne, je fais passer dans le ciel tous les oiseaux de l'île, et je vois se profiler la tête longue d'un peuplier comme le mât du navire de Crusoé ! Je peuple l'espace vide de mes pensées, tout comme il peuplait l'horizon de ses craintes ; debout contre cette fenêtre, je rêve à l'étemelle solitude et je me demande où je ferai pousser du pain…

RÉFLEXION

Pensez-vous que le monde où vous vivez aujourd'hui laisse encore place à la rêverie ? Vous présenterez votre réflexion dans un développement organisé. Votre texte fera au moins deux pages.15 points


Dans l'extrait du Voyageur Immobile de Jean Giono, l'enfant est transporté dans une rêverie par le biais des odeurs de l'épicerie-mercerie de Mlle Alloison. Le monde réel se métamorphose alors pour devenir un monde imaginaire dans lequel l'épicerie est devenue un navire. L'imagination apparaît donc comme la capacité à développer une rêverie, à créer un monde imaginaire, à partir d'éléments réels. Le monde dans lequel nous vivons laisse-t-il encore place à l'imagination ? Tout d'abord, le monde actuel coupe court à l'imagination. Ensuite, le monde actuel nous empêche de développer notre propre monde imaginaire. Enfin, le monde actuel ne laisse pas place à la rêverie.

On peut affirmer que le monde dans actuel ne laisse pas de place à l'imagination. Tout d'abord, le monde dans lequel nous vivons coupe court à l'imagination, l'étouffe, car de plus en plus de distractions sont mises à la disposition des enfants, ce qui les empêche de créer par eux-mêmes un monde imaginaire. En effet, la quantité d'images qui circulent au travers des médias, des jeux vidéo ou des films pose d'emblée le cadre des mondes imaginaires des enfants sans qu'ils aient besoin de les inventer.

En outre, le monde actuel sollicite continuellement notre attention du fait de ces mêmes distractions qu'il propose, si bien que nous sommes de moins en moins capables de nous concentrer sur des activités simples, à la base de l'imagination et de la création d'univers imaginaires. Par exemple, dans le roman La Guerre des Boutons de Louis Pergaud, les enfants de Longeverne et de Verlans rivalisent d'imagination pour trouver les moyens d'embêter leur ennemi.

Enfin, le monde dans lequel nous vivons est un monde qui va de plus en plus vite. Or le corollaire de l'imagination est le fait d'avoir le temps de rêver. Ainsi, le monde actuel ne laisse pas la place, ni le temps, à l'imagination de se développer. Le film de Charlie Chaplin Les Temps Modernes met en exergue cette excessive rationalisation du monde qui, petit à petit, réduit la place de l'imagination et de la créativité.

En conclusion, le monde dans lequel nous vivons ne laisse que très peu de place à l'imagination et à la rêverie. L'enjeu est alors d'exacerber son imagination en utilisant tous les éléments, toutes les images que met à notre disposition le monde moderne.
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