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 DU BREVET AU BAC :: LECTURES ANALYTIQUES ET COMMENTAIRES :: Boris Vian, le déserteur, une chanson original,l'épistolaire

Boris Vian, le déserteur, une chanson original,l'épistolaire

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MessageSujet: Boris Vian, le déserteur, une chanson original,l'épistolaire  Posté leJeu Oct 29, 2015 9:43 pm Répondre en citant

Boris Vian, le déserteur


Lecture


Monsieur le Président
Je vous fais une lettre
Que vous lirez peut-être
Si vous avez le temps
Je viens de recevoir
Mes papiers militaires
Pour partir à la guerre
Avant mercredi soir
Monsieur le Président
Je ne veux pas la faire
Je ne suis pas sur terre
Pour tuer des pauvres gens
C'est pas pour vous fâcher
Il faut que je vous dise
Ma décision est prise
Je m'en vais déserter

Depuis que je suis né
J'ai vu mourir mon père
J'ai vu partir mes frères
Et pleurer mes enfants
Ma mère a tant souffert
Elle est dedans sa tombe
Et se moque des bombes
Et se moque des vers
Quand j'étais prisonnier
On m'a volé ma femme
On m'a volé mon âme
Et tout mon cher passé
Demain de bon matin
Je fermerai ma porte
Au nez des années mortes
J'irai sur les chemins

Je mendierai ma vie
Sur les routes de France
De Bretagne en Provence
Et je dirai aux gens:
Refusez d'obéir
Refusez de la faire
N'allez pas à la guerre
Refusez de partir
S'il faut donner son sang
Allez donner le vôtre
Vous êtes bon apôtre
Monsieur le Président
Si vous me poursuivez
Prévenez vos gendarmes
Que je n'aurai pas d'armes
Et qu'ils pourront tirer

Boris Vian, Le déserteur

Le choix de la forme épistolaire : une chanson originale

⦁ Le texte se revendique dès le début comme une lettre : « je vous fais une lettre »(v.2) La forme épistolaire de la chanson est apparente, puisque le rapport épistolaire est présenté dans les premiers vers « que vous lirez peut-être » / « Si vous avez le temps »
⦁ Par ailleurs, la chanson mentionne les deux protagonistes principaux d'une correspondance épistolaire : un épistolier, un destinataire : l'apostrophe « M .le Président » apparaît en tête du texte et est reprise aux vers 9 et 44.
⦁ L'étude des indices d'énonciation est révélatrice. L'épistolier et le destinataire manifestent leur présence dans le texte à travers une abondance de pronoms à la première personne du singulier « Je » et à la deuxième personne du pluriel « vous ».
Mais cet épistolier non identifié est fictif. Il ne s'agit pas de Boris Vian car il fait de ce « Déserteur » un symbole destiné par le biais de la chanson à toucher un vaste public.

⦁ Comme toute lettre, la chanson est inscrite dans un contexte spatio -temporel précis : l'énonciateur doit partir à la guerre « avant mercredi soir ». Mais il préfère errer sur « les routes de France ».
⦁ En outre, le texte donne aussi quelques précisions sur l'épistolier : il est un ancien combattant (« quand j'étais prisonnier ».
⦁ Mais guerre a aussi cruellement frappé sa famille. Il a vu « mourir [son] père » et « souffrir [sa] mère ». Il a vu « partir [ses] enfants » et a été séparé de sa femme (« on m'a volé ma femme »)
⦁ Enfin, son niveau social est également identifiable. L'épistolier est sans doute un homme du peuple, peut-être un paysan. Il recourt à des formules familières : « je vous fais une lettre ». Quelquefois la syntaxe est relâchée : « c'est pas pour vous fâcher ».

Dénonciation de la guerre et expression de la révolte

L'auteur reproche ensuite à l'état les nombreuses guerres qui ont déjà eu lieu, il est las d'obéir et de souffrir à cause de cela « Depuis que je suis né, J'ai vu mourir mon père, J'ai vu partir mes frères, Et pleurer mes enfants », « Quand j'étais prisonnier on m'a volé ma femme, On m'a volé mon âme, et tout mon cher passé » il lui reproche en fait sa souffrance. Puis il évoque le passé proche : « je viens de recevoir mes papiers militaires », « ma décision est prise ». Les deux événements sont liés par l'impression d'une décision résolue et déterminée. Ensuite, il emploie le présent : « je ne veux pas la faire », « je ne suis pas sur terre pour tuer ». On comprend dès lors que sa décision de déserter ne relève pas de la peur ou de la lâcheté mais du pacifisme. Pour finir, Vian recourt au futur : « je m'en vais déserter ». Le futur marque ici sa décision irrévocable, liée au présent avec ses conséquences : « je fermerai ma porte », « j'irai' sur les chemins », « je mendierai », « je crierai », « ils pourront tirer ». Le « Déserteur » deviendra un véritable exilé, une sorte de mendiant errant et criant. Ainsi, il ressemble à un poète engagé prêt à sacrifier sa vie en quittant tout ce qui lui est cher au nom des valeurs qu'il défend.
lexique de la perte (« mourir », « partir », « voler » et de la souffrance (« souffert », « dedans sa tombe », « prisonnier
Avec le titre du texte « Le Déserteur » déjà, l'auteur provoque l'état. En effet, en temps de guerre où beaucoup d'hommes sont envoyés au front, la désertion est bien sûr interdite. Par ailleurs, la chanson développe un champ lexical de l'insoumission, de la révolte comme le révèlent les verbes « déserter » et « crier ». L'emploi du futur est associé à l'opposition : « Refusez d'obéir », « Refusez de la faire », « N'allez pas à la guerre ».
Boris Vian accuse directement l'état d'assassiner sans raison, de cacher la réalité de la guerre. La fin de la chanson est de plus en plus antipatriote, Boris Vian qui, déjà simplement avec la diffusion de son texte, influence les gens à ne pas aller au recrutement, déclare ouvertement qu'il poussera le monde à la désobéissance et à la désertion « Et je dirai aux gens, Refusez d'obéir, Refusez de la faire, N'allez pas à la guerre, Refusez de partir ». Après avoir exposé toutes les horreurs de la guerre, l'auteur accuse une nouvelle fois le gouvernement, cette fois il lui reproche d'obliger son peuple à aller se faire tuer sans pour autant qu'il y aille lui-même, Boris Vian le défie d'ailleurs ironiquement de le faire « S'il faut donner du sang, Aller donner le vôtre, Vous êtes bon apôtre, Monsieur le Président ».
La revendication du pacifisme

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