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 DU BREVET AU BAC :: DU REALISME AU NATURALISME : MAUPASSANT-BALZAC-ZOLA :: Maupassant, une vie, l'accouchement de Jeanne, chapitre 8

Maupassant, une vie, l'accouchement de Jeanne, chapitre 8

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MessageSujet: Maupassant, une vie, l'accouchement de Jeanne, chapitre 8  Posté leVen Fév 03, 2017 3:19 pm Répondre en citant






Objet d’étude : Le roman et la nouvelle au XIXe siècle : réalisme et naturalisme





Texte : Guy de Maupassant, Extrait de Une vie (1883)


Maupassant, une vie, l'accouchement de Jeanne, chapitre 8


Une vie ou l’humble vérité est un roman de Guy de Maupassant paru en 1883. Jeanne Le Perthuis des Vauds, personnage central, est, au début du roman, une jeune fille de 17 ans, généreuse, heureuse et pleine d’espérance. À peine sortie du couvent1, elle tombe amoureuse de Julien de Lamare et se marie avec lui. Ce mariage est très vite une terrible désillusion. Non seulement son époux la délaisse et la traite avec dureté, mais encore elle découvre qu’il la trompe avec sa servante Rosalie, qu’elle considère comme une amie. Celle-ci a même eu un enfant de lui, à la naissance duquel Jeanne était présente. Jeanne elle-même tombe enceinte. Son accouchement se situe au chapitre 8 (dans un roman de 14 chapitres), juste après cette découverte bouleversante. Extrêmement déprimée, elle a même songé au suicide. L’accouchement se déclenche avant la date prévue. Et la malade, de temps en temps, poussait une faible plainte. Pendant deux heures, on put croire que l’événement se ferait longtemps attendre ; mais vers le point du jour, les douleurs reprirent tout à coup avec violence, et devinrent bientôt épouvantables. Et Jeanne, dont les cris involontaires jaillissaient entre ses dents serrées, pensait sans cesse à Rosalie qui n’avait point souffert, qui n’avait presque pas gémi, dont l’enfant, l’enfant bâtard, était sorti sans peine et sans tortures. Dans son âme misérable et troublée, elle faisait entre elles une comparaison incessante ; et elle maudissait Dieu, qu’elle avait cru juste autrefois ; elle s’indignait des préférences coupables du destin, et des criminels mensonges de ceux qui prêchent la droiture et le bien. Parfois la crise devenait tellement violente que toute idée s’éteignait en elle. Elle n’avait plus de force, de vie, de connaissance que pour souffrir. Dans les minutes d’apaisement elle ne pouvait détacher son oeil de Julien ; et une autre douleur, une douleur de l’âme l’étreignait en se rappelant ce jour où sa bonne était tombée aux pieds de ce même lit avec son enfant entre les jambes, le frère du petit être qui lui déchirait si cruellement les entrailles. Elle retrouvait avec une mémoire sans ombres les gestes, les regards, les paroles de son mari devant cette fille étendue ; et maintenant elle lisait en lui, comme si ses pensées eussent été écrites dans ses mouvements, elle lisait le même ennui, la même indifférence pour elle que pour l’autre, le même insouci d’homme égoïste, que la paternité irrite. Mais une convulsion effroyable la saisit, un spasme si cruel qu’elle se dit : « Je vais mourir. Je meurs ! » Alors une révolte furieuse, un besoin de maudire emplit son âme, et une haine exaspérée contre cet homme qui l’avait perdue, et contre l’enfant inconnu qui la tuait. Elle se tendit dans un effort suprême pour rejeter d’elle ce fardeau. Il lui sembla soudain que tout son ventre se vidait brusquement ; et sa souffrance s’apaisa. La garde et le médecin étaient penchés sur elle, la maniaient. Ils enlevèrent quelque chose ; et bientôt ce bruit étouffé qu’elle avait entendu déjà la fit tressaillir ; puis ce petit cri douloureux, ce miaulement frêle d’enfant nouveau-né lui entra dans l’âme, dans le coeur, dans tout son pauvre corps épuisé ; et elle voulut, d’un geste inconscient, tendre les bras. Ce fut en elle une traversée de joie, un élan vers un bonheur nouveau, qui venait d’éclore. Elle se trouvait, en une seconde, délivrée, apaisée, heureuse, heureuse comme elle ne l’avait jamais été. Son coeur et sa chair se ranimaient, elle se sentait mère ! Elle voulut connaître son enfant ! Il n’avait pas de cheveux, pas d’ongles, étant venu trop tôt ; mais lorsqu’elle vit remuer cette larve, qu’elle la vit ouvrir la bouche, pousser ses vagissements2, qu’elle toucha cet avorton3 fripé, grimaçant, vivant, elle fut inondée d’une joie irrésistible, elle comprit qu’elle était sauvée, garantie contre tout désespoir, qu’elle tenait là de quoi aimer à ne savoir plus faire autre chose. Dès lors elle n’eut plus qu’une pensée : son enfant. Elle devint subitement une mère fanatique, d’autant plus exaltée qu’elle avait été plus déçue dans son amour, plus trompée dans ses espérances. Il lui fallait toujours le berceau près de son lit, puis, quand elle put se lever, elle resta des journées entières assise contre la fenêtre, auprès de la couche légère qu’elle balança.

Guy de Maupassant, Une vie (1883)


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